Lettre à un ami (mercredi, 21 septembre 2011)

Cher Ashab,

C'est vrai, c'est une problème : chaque fois que je te visite dans ta librairie, tu travailles et nous sommes interrompus dans nos discussions.

Hier nous avons amorcé un débat que nous n'avons pas terminé.

Tu as aimé "L'art français de la guerre" et détesté "Les Bienveillantes", contrairement à moi. Dans le bus, j'ai réfléchi à nos positions respectives.

 Première remarque tu es libraire, donc tourné vers la vente et la nouveauté. Comme ancienne prof, je suis plus naturellement orientée  vers la littérature du patrimoine.

 Mais aussi tu es quadra et moi sexa : deux générations différentes ! Énorme aujourd'hui.

Or, "L'Art français de la guerre"  le roman d'Alexis Jenni me paraît typique de la génération quadra, aimant étaler son ressenti et portant son sexe en bandoulière. "Les Bienveillantes" ne sont pas dépourvues de concession au goût du jour mais c'est minime au regard de la force prodigieuse du roman.

Dans "L'art français..." une loghorée dont je n'ai ressenti ni le sens, ni l'intérêt... Dans "Les Bienveillantes", pas un mot de trop même si certains aspects du récit m'ont paru de trop. Mais la différence fondamentale est ailleurs.

 Alexis Jenni écrit sur la guerre : mais pourquoi ? Il fait le portrait  d'un guerrier : encore pourquoi ? J'ai senti de la complaisance à l'égard ce qu'il appelle le retour du militaire dans notre société.

Jonathan Littell au contraire va à l'essentiel en affrontant de plein fouet le problème du Mal. Ce mystère que depuis des millénaires "les hommes de bonne volonté" essaient d'appréhender, de comprendre, d'expliquer. 

Pour moi le livre de Jenni est vide alors que celui de Jonathan Littell est plein d'humanité. 

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