Images (mercredi, 19 septembre 2007)

Vous connaissez, j'espère, parmi les blogues que j'ai mis en lien, ces deux très beaux blogues de photos : celui de Bruno "Carnet de voyage" et celui de Pierre "Pêle-Mêle".
Pour ma part je les aime particulièrement car la photo est chez eux, au-delà de la beauté de l'image, le point de départ d'une méditation dont les mots vous accompagnent même après avoir cliqué pour fermer la page.
Et pourtant nous sommes saturés d'images, jusqu'à la nausée.
Michel Tournier, dont malheureusement on parle moins, passionné de photo lui aussi, avait écrit sur les risques de l'image, dans ce roman où il confronte culture occidentale et culture orientale et qui s'appelle "La Goutte d'Or".

"En vérité l'image est bien l'opium de l'Occident. Le signe est esprit, l'image est matière. La calligraphie est l'algèbre de l'âme tracée par l'organe le plus spiritualisé du corps, sa main droite. Elle est la célébration de l'invisible par le visible. L'arabesque manifeste la présence du désert dans la mosquée. Par elle l'infini se déploie dans le fini. Car le désert, c'est l'espace pur, libéré des vicissitudes du temps."

Quand j'étudiais ce texte avec mes élèves, je les faisais ensuite travailler sur l'image devenue "icone" c'est-à-dire dotée d'un pouvoir quasi spirituel qui nous manipule. Comme support j'utilisais la photo mythique de Che Guevarra.
Certaines religions, le Judaïsme, le Protestantisme et l'Islam ont perçu le danger de l'image qu'elles ont exclue de leurs temples.
Mais pourtant, si nous étions tous devenus protestants, nous n'aurions pas eu Le Caravage et tous les grands peintres italiens de la contre-réforme puisque l'Eglise catholique a été, à cette époque, le principal mécène des peintres et sculpteurs.
Un monde sans images... Il a existé dans le passé, un passé pas si ancien finalement.
Je viens de terminer la lecture d'un roman intéressant : "Retour" de Anna Enquist.
La vie du navigateur James Cook, grand géographe du XVIII ème siècle. Dans ce roman, sa femme l'attend... Très beau personnage d'une femme, sensible et intelligente, qui souffre de ne pouvoir se représenter la vie de son mari à Tahiti malgré tout ce qu'il raconte ou écrit...Absence d'images. Je me demande ce que pouvait ressentir ces femmes de navigateurs ou autres voyageurs, en ces temps-là, privées de représentations.
Je me demande d'ailleurs pourquoi j'écris cette note moi qui passe beaucoup de temps au cinéma.
Peut-être à cause de mes dernières visites à "Pêle-Mêle" et "Carnet de Voyage".

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