Quand les objets du passé tendent la main au présent (mardi, 13 janvier 2009)
Coincée dans un embouteillage du vendredi soir, j'ai entendu à la radio des préconisations pour éviter les deux épidémies du moment, la grippe et la gastro-entérite dispensées par l'hygiéniste de service sur France-Info.
Les hygiénistes ont remplacé les religieux d'antan : comme avec les bonnes soeurs de ma jeunesse, il faut toujours suivre la pente qui monte pour assurer son Salut, ne pas boire, se fatiguer à courir, se priver de tout ce qu'on aime et j'en passe.
Pour éviter les contagions, il faut donc, et c'est entré dans nos moeurs, utiliser un mouchoir à "usage unique." Je ne sais pas pourquoi, ont défilé dans ma tête, les images des paysans de mon enfance. Je les revois, avant de se moucher, en un geste lent et solennel, ils dépliaient leur grand mouchoir à carreaux copieusement maculé, et cherchaient un coin un peu moins sale pour soulager leurs narines en soufflant bruyamment. Avec le même calme, ils le repliaient et le fourraient dans leur poche. L'opération durait un certain temps même si je l'allonge un peu par le souvenir. Avaient-ils plus la grippe qu'aujourd'hui ?
Récemment, je me suis trouvée dans ma chambre avec ma petite-fille qui a éprouvé une envie urgente de se moucher.
J'ai pris un mouchoir sur une pile que je conserve dans un placard. Pile de mouchoirs récupérés, ceux de mon enfance, ceux de mon père qui n'a jamais pu s'habituer au mouchoir en papier-c'était un cadeau traditionnel le mouchoir brodé à nos initiales et on ne peut dire qu'il nous ravissait. Celui-ci, en photo, est d'une arrière grand-tante. Elle l'a brodé elle-même et il a plus de cent ans. L'ourlet, un très fin roulotté dont on ne voit pas les points, est une merveille.
Je tends donc un mouchoir à ma petite-fille, un joli avec une dentelle au bord, et voilà qu'elle m'interroge :
- Qu'est-ce que c'est ça mamie ?
Moi interloquée.
- C'est un mouchoir ma chérie, tu peux te moucher dedans.
Elle s'exécute puis, l'ayant replié, se dirige vers la poubelle de la salle de bains avec l'intention de l'y jeter. Je rectifie le geste à temps pour l'orienter vers la corbeille à linge sale.
Ouf ! "l'usage unique" a été respecté et ma petite-fille a découvert un objet de patrimoine.
10:37 | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : lyon, vive la vie | Facebook | Imprimer
Commentaires
Chaque geste était lent et solennel!c'est tout à fait çà!
Le pain que l'on coupait en le reposant toujours à l'endroit!
De jolis souvenirs
Bonne journée Rosa
Écrit par : noelle | mardi, 13 janvier 2009
Adieux les jolis mouchoirs
Adieux tous les Madras !!!
Écrit par : Yves | mardi, 13 janvier 2009
Un des paysans de ton enfance, c'était moi...lorsque je me mouchais à l'intérieur, car dans la nature c'était en "live" avec un appui sur une narine et puis "destination" au gré du vent ou du hasard.
L'hiver j'ai encore souvent un vrai mouchoir avec initiales dans ma poche...pour mes enfants utilisions encore des mouchoirs en tissus et un paquet de "kleenex"dans la poche ou le cartable.
J'ai déjà observé celui qui porte en prénom le nom d'un écrivain se soulager les narines comme les paysans de ton temps ou les grands sportifs à la télévision en 2009.
Par contre sa petite sœur est souvent comme nous étions avec la "morve" au nez, prête à s'essuyer avec n'importe quel support...là le temps n'a pas évolué...comme sa Mamie ou son Nonno.
Écrit par : AlsaCop | mardi, 13 janvier 2009
L'hygiénisme en France fait vraiment du dégat... Mes grands parents étaient ils plus enrhummés que nous, qui sommes invités à utiliser ces "mouchoirs à usage unique" ?
Écrit par : Falconhill | mardi, 13 janvier 2009
ah Rosa, tu parles si joliment des petits objets du quotidien qui disparaissent petit à petit de nos regards et de nos usages...
Écrit par : patoo | mardi, 13 janvier 2009
Bonjour Rosa!
Je découvre votre blog avec plaisir!
J'utilise moi-même chaque jour des mouchoirs en tissus, par souci écologique, qui passent ensuite à la machine avec des noix de lavage, que j'ai "hérité" (si l'on peut dire ainsi) de ma grand-mère maternelle.
C'était une petite dame coquette et j'affectionne tout particulièrement ses mouchoirs brodés de fleurs.
D'un autre côté, j'ai ceux "hérité" de mon grand-père Milo qui lui est tel que vous le décrivez : grand mouchoirs à carreaux et qu'il utilisait bruyamment!
A bientôt.
Écrit par : suzie | mardi, 13 janvier 2009
comme quoi nous fabriquons et utilisons de l'éphémère... que de souvenirs effectivement autour d'un mouchoir, brodé ou nom, ceux de mon enfance que j'ai gardé, colorés, ceux de mon Père, à carreaux avec son initiale, ceux de ma Maman, plus fins, dentelles et broderies... Je parlerais ainsi également des serviettes de table, celles du dimanche ou des réceptions, blanches, brodées, et celles du quotidien, sagement pliées dans une petite pochette personnalisé, ou serrées dans un rond en bois portant notre nom.. ! oh oui, que des souvenirs lorsque nous retrouvons ce beau linge.
Écrit par : sol-asido | mardi, 13 janvier 2009
Rosa, tu me fais me souvenir que j'avais petite des cours de couture, où nous ourlions des mouchoirs! Bonne soirée Rosa, merci pour tes passages chez moi, ça me fait plaisir.
Écrit par : Sophie L.L | mardi, 13 janvier 2009
Bonjour Rosa...
Porteur de lunettes et sensible à leur propreté j'utilise deux mouchoirs "coton" journellement et sur les centaines de personnes que je "rencontre" annuellement 90 % sont carrément "surpris" quand je sors mon mouchoir de la poche droite et que j'essuie mes lunetttes (en cas de pluie par exemple comme ce matin en entrant dans mon bureau...), et encore plus, si dans la même réunion, je sors mon mouchoir de la poche gauche pour m'essuyer le visage...
...pour me moucher j'utilise des mouchoirs en papier comme beaucoup de monde le fait, et pour protéger la nature, ceux - ci se retrouvent sur mon compost (eh oui dois-je rappeler que nous vivons à la campagne) avec les essuie-tout... une fois utilisés... tri sélectif oblige !
... quand je pleure, ce qui m'arrive, comme hier, je pleure dans le"coton"...
la bonne journée...
doume
Écrit par : Doume | mercredi, 14 janvier 2009
Excuse-moi Alsa mais j'ai encore du mal à comprendre la fin de ton commentaire...
Faucon on est sur la même longueur d'onde !
Patoo...à bientôt
Suzie, j'apprécie ta remarque : venant d'un futur médecin elle est appréciable.
en revanche pour l'argument écologique je suis d'accord avec Doume : le mouchoir en papier peut se retrouver au compost avec les filtres à café.
Sophie, j'ai connu ces cours de couture.
On y faisait également la lecture à voie haute (dans mon école) pendant qu'on y tirait l'aiguille : j'avoue avoir plus souvent lu que tiré l'aiguille, d'où ma nostalgie.
Sol-asido
les serviettes de table, autre bel objet du quotidien.
Je suis revenue au tissu également après avoir cédé, quand j'avais des invités, à la facilité du papier.
Écrit par : Rosa | mercredi, 14 janvier 2009
Nous apprenions à coudre et à broder à l'école, et ce n'était pas au détriment d'autres matières "culturelles". Sans doute les classes étaient-elles moins remplies...
Je garde aussi précieusement les mouchoirs que j'ai brodés jadis, et le linge des aïeules qui a pu résister à la machine à laver ! Souvent les serviettes de table étaient si grandes qu'elles peuvent servir de petites nappes aujourd'hui... Aujourd'hui, où dans la confection des vêtements ou du linge de maison, on est tant avare du tissu !
Bonne journée Rosa.
Écrit par : gazelle | mercredi, 14 janvier 2009
@ la latine.
Un "grand H..." qui se mouche comme les paysans dans le temps dans les champs ou les sportifs à la télévision, sans aucun support. (style appui narine...)
La petite fille, la "morve au nez" comme ses parents, grands parents.... dans le temps.
..."without" imagination !
Écrit par : AlsaCop | mercredi, 14 janvier 2009
Gazelle ma petite-fille adore ces grandes serviettes.
Alsa et Doume, c'est sympa de vous glisser dans les discussions "chiffons".
Écrit par : Rosa | mercredi, 14 janvier 2009
En Alsace, sommes des attardés, car dans un tiroir...de vrais mouchoirs dédiés.
Kleenex ou Lotus pour le rhume...que j'ai une fois tous les 5 ans.
Écrit par : AlsaCop | mercredi, 14 janvier 2009
Ayant grandi en pleine époque "mouchoirs en papier", je n'en ai jamais utilisé... Il faut dire que ma mère m'enseigna dès ma plus tendre enfance à me servir de bons vieux mouchoirs en tissu, ce qui fit qu'ensuite j'accueillis le mouchoir en papier comme un objet étrange et repoussant ! Aujourd'hui, je garde encore précieusement mes mouchoirs en tissu, et je ne suis pas plus malade que les autres... Et même, à dire vrai, je le suis moins ! Cela fait réfléchir, non ?
Écrit par : Antoine Forces | vendredi, 16 janvier 2009
Merci Antoine pour ce témoignage qui me confirme que nos hygiénistes patentés disent des c....
Écrit par : Rosa | vendredi, 16 janvier 2009