Victor et François (jeudi, 22 janvier 2009)
C'est l'histoire d'un compagnonnage au-delà de la mort : celui de Victor Segalen et de François Cheng. Deux passeurs marchant en sens inverse.
Victor Segalen breton, médecin, poète et voyageur. Il va parcourir la Chine de 1908 à 1918 avant de décéder en 1919.
Par amour pour cette nation et cette civilisation il deviendra archéologue et conduira des recherches et des fouilles sur la dynastie Han. Son recueil de poèmes "Stèles" est un hymne à la Chine.
Cité violette interdite |
"Elle est bâtie à l'image de Pei-king, capitale du Nord, sous un climat chaud à l'extrême ou plus froid que l'extrême froid.
À l'entour, les maisons des marchands, l'hôtellerie ouverte à tout le monde avec ses lits de passage ses mangeoires et ses fumiers.
En retrait, l'enceinte hautaine, la Conquérante aux âpres remparts, aux redans, aux châteaux d'angles pour mes bons défenseurs.
Au milieu, cette muraille rouge, réservant au petit nombre son carré d'amitié parfaite.
Mais, centrale, souterraine et supérieure, pleine de palais, de lotus, mes eaux mortes, d'eunuques et de porcelaines, -- est ma Cité Violette interdite."
François Cheng est né chinois et est devenu français par amour de la culture française. Il a été admis à l'Académie française.
Poète, auteur de très beaux romans comme "Le dit de Tyany", traducteur, essayiste.
Ils ne pouvaient que se rencontrer même si François Cheng est né en Chine dix ans après la mort de Segalen. C'est dans un livre de François Cheng que la rencontre avec Victor Segalen s'est produite.
"L'un vers l'autre" est le tite de cet ouvrage. François découvre sa Chine à travers les mots de Victor. Voyage commun, main l'un vers l'autre, le breton et le chinois.
François comprend la poésie de Victor.
"Avant que ne s'achève le XXè siècle, il serait bon, n'est-ce pas, qu'ayant fait le parcours inverse, quelqu'un venu de l'Orient extrême vienne saluer le poète en sa terre natale, en ce "finistère" de l'Occident extrême."
Ce que François admire chez Victor c'est sa confrontation avec le réel, la géographie chinoise si dure au voyageur que Victor a affronté parfois au péril de sa vie. Comme cette descente en sempan, bateau fragile, dans les gorges du Yang-Tse dont les remous sont mortels. (à ce jour ils ne le sont plus depuis le barrage des Trois-Gorges)
"Cette espèce de mythologie géographique (ou dynamisme universel), Segalen l'a sentie très fort et fait entrer dans sa propre vision."
Le poète se laisse transformer par la terre chinoise. L'homme des bords de mer découvre la puissance de la terre, les montagnes, lieux sacrés dans l'imaginaire chinois. Et surtout "Le fleuve". (Le Yang-Tse)
"Mais le Fleuve, par son existence fluidique, ordonnée, contenue, donnant l'impression de la Cause, du Désir, est accessible à tous les amants de la vie." écrit Victor et François lit : "À l'image du Fleuve, de nature à la fois Yin (douceur porteuse) et yang (écoulement puissant), il a vu au travers d'un combat proprement sexuel, sa propre double nature, mausculine et féminine, pleinement révélée".
François a été bouleversé par les écrits de Victor sur ses voyages en Chine. Lui-même s'est senti, dans les années soixante, quand la Chine était fermée au monde, en exil en France ayant perdu l'espoir d'y retourner un jour. Les livres de Victor lui ont évité de sombrer dans la dépression. Grâce à lui il retrouvait son pays et découvrait des régions qu'il n'avait jamais visitées. Et il conclut.
"Je venais de faire le même voyage que Segalen, sous une forme autre, et que ce qui me semblait à jamais hors d'atteinte m'était offert sans réserve.Toute nostalgie évanouie, je me suis senti réconcilié avec la terre de France qui m'avait accueilli."
18:32 | Lien permanent | Commentaires (25) | Tags : littérature, chine, vive la vie, lyon | Facebook | Imprimer
Commentaires
Je ne les connaissais pas...Tu le sais que je n'ai aucune culture littéraire, mais cette note me rappelle un point que j'avais oublié.
Écrit par : AlsaCop | jeudi, 22 janvier 2009
bonsoir Rosa, ce soir je me promène sur les blogs amis etlà sur le tien, je vois un billet sur Victor Segalen et François Cheng."Le dit de Tyani " est un roman magnifique (comme les autres romans et essais qu'il a écrit), un roman poétique et terrible qui m'a profondémment bouleversée en tant qu'artiste. Mais les romans de François Cheng atteignent l'âme dès les premières pages...As- tu lu " l'éternité n'est pas de trop"?j'espère que oui!
à bientôt
Patricia
Écrit par : patoo | jeudi, 22 janvier 2009
Alsa rassure-toi Segalen est très peu connu.
François Cheng davantage il me semble.
Patoo, bien sûr j'ai lu "L'éternité n'est pas de trop".
Ce qui est fantastique avec François Cheng c'est qu'il a une âme chinoise et l'écriture d'un poète français.
Tu es à Paris ?
Écrit par : Rosa | jeudi, 22 janvier 2009
Merci Rosa
Je n'ai rien lu de Victor segalen ni de François cheng
ils seront "les prochains" envie de les découvrir
Bonne nuit
Écrit par : noelle | jeudi, 22 janvier 2009
Très interessant ce billet, je n'ai rien lu de Segalen, mais François Cheng m'a régalée... En plus je crois que c'est quelqu'un de très élégant. Un ami qui l'admirait beaucoup lui a envoyé un jour quelques aquarelles de voyage, même pas chinoises et quelques mois après dans une enveloppe il a reçu un mot bienveillant d'encouragements écrit de la main de François Cheng et, cerise le gateau il avait joint à son envopi un minuscule idéogramme, plié sur un autre papier, minuscule au fond de l'enveloppe. J'ai trouvé ça très classe de la part de FR.Cheng (en plus de ses écrits bien sûr), cette attention portée à un inconnu
Écrit par : frasby | vendredi, 23 janvier 2009
Frasby je ne suis pas étonnée de ce que vous me dites de la délicatesse de François Cheng. Il a gardé une âme chinoise et n'a pris en France que le meilleur.
Une amie dont j'ai parlé
http://cybermamies.hautetfort.com/archive/2008/08/18/nee-poussiere.html
qui est de sa génération, a eu un destin semblable et l'a bien connu, nouant avec lui une solide amitié
m'a dit hier soir, en parlant de "L'un vers l'autre", c'est tout à fait François.
Cette amie, Danièle, qui travaille toujours bénévolement à la bibliothèque de la Part-Dieu pour le Fonds chinois, espère le faire venir à Lyon...
Écrit par : Rosa | vendredi, 23 janvier 2009
oui Rosa, je suis à Paris jusqu'au 3 février,préviens moi lorsque François Cheng nous rendra visite!!!
le message de Noelle soulignant sa délicatesse m'a touchée et je trouve qu'elle correspond à celle de ses écrits
Écrit par : patoo | vendredi, 23 janvier 2009
Patoo tu sembles avoir confondu Noelle et Frasby.
Mais tu as raison.
François Cheng est un grand écrivain et un homme de qualité.
Écrit par : Rosa | vendredi, 23 janvier 2009
Bonne fin de semaine...
Écrit par : AlsaCop | vendredi, 23 janvier 2009
Beaucoup de poésie et d'élégance chez l'un comme chez l'autre. Et quels styles !
J'ai lu trop peu : tu me donnes envie d'y retourner.
Écrit par : gazelle | samedi, 24 janvier 2009
Enfin, je vois ta nouvelle bannière, très réussie, bravo !
Écrit par : gazelle | samedi, 24 janvier 2009
des livres à lire; merci Rosa. Je ne connaissais pas et ne savais pas qui était Victor Segalen dont le nom a été donnéà l'Université Bordeaux 2.
Écrit par : xavier | samedi, 24 janvier 2009
Et bravo pour le titre et la bannière. Un petit coup de rajeunissement ...
Écrit par : xavier | samedi, 24 janvier 2009
Très jolie bannière, Rosa!
Ton départ c'est pour quand?
Grosse tempête depuis hier soir...
Bonne journée
Écrit par : noelle | samedi, 24 janvier 2009
Xavier, tu connais l'Université Segalen de Bordeaux ? Sais-tu pourquoi on lui a donné ce nom ?
à ma connaissance Segalen n'a pas vécu à Bordeaux.
Hommage au poète ou au voyageur.
Noelle je ne partirai pas aussi longtemps que Yves : fin-février seulement.
Écrit par : Rosa | samedi, 24 janvier 2009
Gazelle oui élégance mais aussi beaucoup d'intériorité, chez l'un comme chez l'autre.
Écrit par : Rosa | samedi, 24 janvier 2009
↑ À propos de la Faculté de médecine de Bordeaux où l'élève-médecin Victor Segalen fut étudiant, puis docteur en médecine, il le fut, parallèlement, comme nombre de Brestois et Bretons du littoral, également à l'École Principale du Service de Santé de la Marine et des Colonies, sise au 147 Cours de la Marne à Bordeaux ; cette école sera ensuite appelée, initialement par les Bordelais d'ailleurs, École de Santé Navale, puis sera L'EPSSM (École Principale du Service de Santé de la Marine), encore dite, en milieu maritime La Principale. Elle est aujourd'hui, à Bordeaux, sur le même site, une partie de l'École du Service de Santé des Armées (l'autre école, héritière de l'École de Santé Militaire, étant située à Lyon-Bron).
Université Segalen date de 1971
Écrit par : noelle | dimanche, 25 janvier 2009
L’université Bordeaux II fut créée en 1971 suite à la division en 3 de l’ancienne université de Bordeaux.
Écrit par : noelle | dimanche, 25 janvier 2009
Merci Noelle pour ces informations que j'ignorais.
En fait je ne me suis intéressée à sa vie qu'à partir de son départ en Chine;
sais-tu pourquoi les Bretons du littoral venaient faire leurs études à Bordeaux ?
Écrit par : Rosa | dimanche, 25 janvier 2009
non, mais je chercherais!
Écrit par : noelle | dimanche, 25 janvier 2009
Rosa
maintenant ,il me reste à le lire, je connaissais l'homme, son histoire
Un titre? merci
Ce matin le soleil est là, la tempète est partie....
Bonne journée
Bisous
Écrit par : noelle | dimanche, 25 janvier 2009
Merci Noëlle pour les éclaircissements sur l'Université Bordeaux II et Victor Segalen. Ainsi, à l'époque les élèves médecins bretons venaient se former à Bordeaux ?
Écrit par : xavier | dimanche, 25 janvier 2009
Oui Xavier apparemment.
Je chercerai également.
Tu es aussi de Bordeaux ?
Écrit par : Rosa | dimanche, 25 janvier 2009
Très belle idée de faire venir François Cheng à Lyon...Vous nous tiendrez au courant n'est ce pas ?
A bientôt.
Écrit par : frasby | lundi, 26 janvier 2009
Frasby cette initiative dépend de la bibliothèque de la Part-Dieu...Peut-être l'an prochain.
Écrit par : Rosa | lundi, 26 janvier 2009