samedi, 08 mai 2010
La Rose blanche
Hier j'ai eu l'occasion de participer à une très belle cérémonie. Magnifique même. Au départ, je m'y suis rendue par amitié pour une de mes voisines, France, dont le frère Résistant, mort en déportation quelques mois avant la Libération, était honoré par le dévoilement d'une plaque commémorative.
C'est dans notre quartier qu'une résidence universitaire portera le nom de Jean Meygret, décédé à Dora à vingt-six ans. Mort d'épuisement car les prisonniers y travaillaient dans une usine souterraine.
La mairie du cinquième arrondissement de Lyon avait organisé une cérémonie riche en signification. Lieu symbolique : il s'agit de la reconversion d'un ancien hôpital lyonnais situé sur la colline de Fourvière, l'Antiquaille. Un des bâtiments devient résidence universitaire pour des doctorants. Lieu particulièrement indiqué pour porter le nom d'un Résistant, marqué par la présence de Saint-Pothin, martyr chrétien, lieu dont se sont évadés des Résistants aussi connus que Raymond Aubrac.
Les organisateurs avaient eu l'excellente initiative d'associer écoles et lycées du quartier. Ils ont ainsi livré des messages préparés avec leurs enseignants.
Celui qui m'a le plus impressionnée a été celui des élèves du lycée Jean Moulin, situé juste à côté et ce n'est peut-être pas un hasard.
Le professeur d'histoire qui les avait encadrés et avec lequel j'ai échangé après la cérémonie, avait fait le choix d'orienter ses lycéennes vers un mouvement de jeunes résistants allemands du groupe de la Rose blanche.
Nous connaissons mal la Résistance allemande au nazisme.
"Le groupe de résistance La Rose Blanche fut fondé au printemps 1942, à l'université de Munich, par Hans Scholl et Alexander Schmorell.
Les jeunes étudiants refusaient d'accepter le totalitarisme dans lequel avait sombré l'Allemagne, et voulaient sauvegarder leur indépendance d'esprit face au "nihilisme intellectuel" que représentait le nazisme. Ils parlèrent de la situation politique avec Kurt Huber, professeur à l'université de Munich, réputé pour ses cours de philosophie qui impressionnaient et influençaient beaucoup les étudiants. Kurt Huber les encouragea à résister et devint le mentor de la Rose Blanche.
Révoltés par la dictature hitlérienne et les souffrances causées par la guerre, les étudiants se décidèrent à agir pendant l'été 1942. Hans Scholl et Alexander Schmorell rédigèrent les quatre premiers tracts ; ils les envoyèrent par la poste de la fin du mois de juin à la mi-juillet à des destinataires soigneusement choisis à Munich, principalement des intellectuels. Les étudiants se référèrent dans leurs tracts à d'éminents penseurs et écrivains comme Schiller, Goethe, Novalis, mais aussi Lao Tseu, Aristote, et citèrent également la Bible"
Les étudiants furent arrêtés et guillotinés en 1943. Le groupe était décapité.
Un sacrifice qui peut paraître inutile aux yeux de l'Histoire dont il n'a pas infléchi le cours. Sacrifice très important pourtant pour les jeunes allemands d'aujourd'hui car ils peuvent regarder leur passé avec plus de sérénité. Important également pour les jeunes européens d'aujourd'hui qui peuvent se dire que, même sous l'emprise du Mal, il est toujours possible de résister à la barbarie.
Merci au lycée Jean Moulin pour ce travail de mémoire.
C'est aux étudiants de la Rose blanche que je pense aujourd'hui pour le soixante-cinquième anniversaire de la Libération.
09:14 Publié dans Au jour le jour, Chronique lyonnaise, D'une génération à l'autre | Lien permanent | Commentaires (16) | Facebook | Imprimer
Commentaires
Hans et sophie Scholl sont des grandes figures de la résistance à Hitler, leur jeunesse rend leur combat particulièrement impressionnant et reste une leçon à méditer, j'ai travaillé plusieurs années à l'Antiquaille et j'apprends avec plaisir sa reconversion
Bon dimanche Rosa
Écrit par : Dominique | samedi, 08 mai 2010
@Cinéma et...lecture
Il y a le magnifique film à voir ou à revoir:"Sophie Scholl,les derniers jours" avec Julia Jentsch.
Et puis pourquoi pas en parler puisqu'il est fonctionnaire territorial ici à Mérignac et travaille à la médiathéque;c'est monsieur Didier Chauvet qui a écrit :"Sophie Scholl,une Résistante allemande face au nazisme".Il est bibliothécaire depuis 1988.
Pierre
Écrit par : Ulm Pierre | samedi, 08 mai 2010
A mon avis, on en fait trop avec la seconde guerre mondiale. On dirait qu'elle n'est pas finie...
Il y a un intérêt propagandiste à ce l'on appelle parfois la seconde carrière posthume d'Hitler.
En ramenant tout à Hitler, et aux Nazis, cela permet d'éviter la réflexion, et de justifier des exactions modernes présentées comme fatalement moins graves que celles perpétrées par les Nazis.
Montrer qu'il y avait des "gentils" Allemands (quand on y pense, c'est vraiment raciste de penser qu'Allemand=méchant) permet de sortir effectivement un peu de cette logique de réduction "ad Hitlérum".
Écrit par : stéphane | samedi, 08 mai 2010
Des allemands très courageux ! En 1942 il fallait vraiment oser se mouiller et terminer exécutés.
Ce n'était pas des "gentils", c'était des humains....Il faut savoir que dans les "Jeunesses Hitlériennes" un enfant était encouragé dès 1938 à dénoncer et cette délation n'avait aucune limite, un "bon petit allemand de la HJ" pouvait dénoncer ses propres parents !!
Il n'y avait pas de bon ou de méchant, c'était comme au temps de la Terreur Blanche, la propagande n'était pas un leurre et les jeunes étudiants de "La rose blanche" sont de véritables héros, pas naïfs mais responsables.
C'est un bel exemple, cette Rose Blanche, comme une passerelle qui passerait au-dessus du Rhin...Pour unir les habitants des 2 pays....
Vous vous souvenez, Fernandel qui passait le pont entre Kehl et Strasbourg, avec "Marguerite"...Fantastique !!
Il ne s'agit pas d'occulter le Cambodge ou tout autre atrocité actuelle post Seconde guerre Mondiale...
L'on peut échanger ou témoigner librement...C'est essentiel!
...
Écrit par : alsacop | samedi, 08 mai 2010
Belle leçon de résistance, entièrement d'accord avec Alsa
Merci Rosa
Écrit par : noelle | samedi, 08 mai 2010
Pour revenir sur le mot "propagande" cité plus haut et bien c'est cette propagande qui a appuyé et accompagné la révolution culturelle qui se répandait dans la société allemande et dans le tissu bien sûr social contraignant la majeure partie de la population à adhérer aux manifestations du régime.
Une partie de cette société désagrégée par le chomage de masse a cédé à ses vieux démons:le nationalisme et l'antisémitisme.
D'autres (tres rare ) ont pensé que leurs idées ne soient pas murmurées en silence pour elles mêmes et ont agi avec le résultat que l'on connait.
Pierre
Écrit par : Ulm Pierre | dimanche, 09 mai 2010
Je me souviens, il y a bien des années, d'avoir étudié en cours d'allemand un texte sur Sophie et Hans Scholl et que cela m'avait vraiment impressionnée.
Écrit par : Edith | dimanche, 09 mai 2010
Dominique, ravie de découvrir ce lieu de ton passé professionnel...
Pierre merci pour ces informations. J'avais entendu parler du film mais pas du livre.
Écrit par : Rosa | dimanche, 09 mai 2010
Stéphane, non ce retour à la dernière guerre n'a pas les raisons que tu évoques.
Ma génération, née après guerre, a été marquée. Par le silence dans notre enfance sur beaucoup d'aspects de cette période et nous avons besoin de savoir.
D'autre part il n'y a pas de gentils Allemands ou des méchants : on peut juste reconnaître le mérite de ceux qui ont su résister à l'endoctrinement.
Comme Noelle je suis donc d'accord avec Alsa.
Edith tu as de la chance d'avoir étudié ce texte car la Résistance allemande est restée confidentielle pendant longtemps.
Écrit par : Rosa | dimanche, 09 mai 2010
Beau chemin que celui emprunté par "La rose blanche".
Je ne pense pas qu'on en fait trop avec la 2e guerre mondiale. On en a tellement pas fait assez pendant si longtemps... Je ne crois pas que la connaissance du nazisme empêche de se pencher sur les exactions contemporaines. Au contraire.
Écrit par : Dominique | mardi, 11 mai 2010
Que l'on se réfère ou pas à cette période, les atrocités commises par des humains sur d'autres continuent sans jamais s'être arrêtées. La question est plutôt, de comprendre cette mécanique récurente. Pour ma part la réponse est dans notre capacité à obéir. L'expérience de Milgram (reprise il y a quelques temps dans une émission d'antenne 2 et plus connue à travers le film de I comme Icare)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Exp%C3%A9rience_de_Milgram
montre que la plupart d'entre nous (malgré les beaux discours) peut tuer l'autre sous l'injonction d'une autorité quelconque. Réapprenons dès maintenant, la désobéisance civile avant que d'éventuelles résistances ne servent à rien comme ce fut le cas pour ces étudiants de la Rose Blanche.
Écrit par : Philippe | mercredi, 12 mai 2010
Philippe, vive la désobéissance !
Il faut dire que dans la famille l'obéissance n'a jamais été le point fort : va savoir pourquoi !
Écrit par : Rosa | jeudi, 13 mai 2010
vive la désobeissance!
Mais face à l'indifference?
Écrit par : noelle | vendredi, 14 mai 2010
L'indifférence n'est-elle pas une autre forme d'obéissance, l'obéissance à l'ordre établi.
Écrit par : Rosa | vendredi, 14 mai 2010
Un manque d'émotion...
Écrit par : noelle | vendredi, 14 mai 2010
Bonsoir Rosa, je conseille le très beau film: Sophie Scholl, les dernières heures de Marc Rothemund sorti il y a 3 ans (il existe en DVD). Je ne connaissais pas, c'est très intéressant. L'actrice qui joue Sophie Scholl et le film se termine par des images d'archives. Il paraît que dans la réalité, le procés a été pire que ce que l'on voit dans le film. Bonne soirée.
Écrit par : dasola | mardi, 18 mai 2010
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