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mardi, 16 juin 2009

Le poète et le rebelle

à Louis-Paul

amicale complicité autour d'un modèle de sa jeunesse.

Retour sur René Depestre. Pourquoi ce poète est-il moins connu qu'Aimé Césaire ?

Serait-ce parce qu'il a consacré un certain nombre d'années de sa vie à la Révolution cubaine ?

René Depestre est parti à Cuba en 1959, invité par Che Guevara. Il y resté jusqu'en 1971, date à laquelle il s'est fait chasser par le régime castriste.

 

2.jpg

depestre-1.jpg


"Nous avons rêvé puis dérêvé, chanté, puis désenchanté. Espéré,et souvent désespéré. Amères sont les routes du reflux. Plus amer encore ce carrefour où se croisent les routes du reflux et les chemins de l'exil. Haïti n'est pas libre. René vit à Cuba."

Claude Roy  

depestre.jpgChewithCigar.jpg


Testament d'Ernesto Guevara de la Serna

Jeune homme en colère il rêva un soir
d'un Ave Maria plus vaste que la mer ;
un grand grand chambardement général du monde
pour l'ensoleillement de l'homme par l'homme.

Long reste le temps du Che dans l'homme,
long le fleuve, longs le sillon et le chemin
qui attendent les semences, long
le pas marin de l'Ulysse assassiné,
long le temps végétal qui avance
dans la forêt inconnue.

Tout en cet homme était mouvement,
explosion de sève et de volonté :
à nos portes chaque matin,
il mettait son odeur de café fort,
au grand besoin de sa lumière
nous attendait dans l'arche des soirs,
alors que son orient de sel chantait
tout en haut de nos vagues.
Il aura parlé plus haut
que les scandales du tout-fric,

plus haut que les actions achetées
 sur la santé des arbres et des enfants.
Il a parlé plus haut
que nos orgies boursières
plus haut que les vieilles hontes
qui grattent le ciel de nos stupres.

Il a parlé plus haut
que le tohu-bohu des péchés capitaux,
plus haut que le boucan des fraudes
et des trafics aux mille pattes.

Il a parlé plus haut
que les animaux de proie qui broutent
l'herbe folle de nos histoires d'achats et de ventes.

 
L'homme a laissé son herbe à tous les maux,
son étoile sans cap d'azur et sans boussole.
Par les larmes et le sang qui courent
qui osera la porter en croix sur son dos ?
Long reste le bras du Che dans l'histoire,
long le banian qui multiplie la plus vive
des sept utopies de son sang.
Long le rocher où son destin de fleuve est enchaîné.
Long le silence de mort où son rêve échoue
à mettre sur pied l'homme du XXIè siècle,
encore plus long l'adieu au songe du frère
qui dévale à pic le puits de nous-mêmes
René Depestre
1967

Deux photos de Santa Clara, ville conquise par le Che qui a vaincu les troupes de Battista en faisant dérailler leur train. La statue est celle de son Mémorial et la dernière photo celle du passage à niveau où s'est passé l'événement.
IMGP1113.JPGIMGP1127.JPG

 

 

Commentaires

Merci Rosa
C'est pour moi une découverte...
cordialement.

Écrit par : rony | mercredi, 17 juin 2009

Bientôt des photos chez moi....Ernesto, un "mecque" bien ?
Du moins pour moi....tiens en 1967 déjà des "orgies boursières"??

Et des "...sca(n)dales du tout fric" ?? ce n'est donc pas (n)ouveau.

Écrit par : alsacop | mercredi, 17 juin 2009

je dois dire qu'il y a des photos qui inspirent...
bon mercredi Rosa...

Écrit par : Doume | mercredi, 17 juin 2009

Quel lyrisme ! C'est magnifique.

Écrit par : Edith | mercredi, 17 juin 2009

Merci Rosa, il y a pas loin de mon ordi sur l'étagère d'une bibliothèque des photos recues...

Écrit par : Louis-Paul | mercredi, 17 juin 2009

Beau, Rosa, la révolution où l'on souriait et même où, franchement, on riait; révolution de notre jeunesse qui, toujours, avec le sourire nous accompagne. Et : nous tient debout.
Les quelques rares amis que je conserve encore de ce temps-là : ensemble qu'est-ce qu'encore souvent on rit!

Écrit par : PAG | mercredi, 17 juin 2009

Magnifique

Je voulais partir avec" yu hua", mais il était "sorti" (médiatheque) ce sera pour le retour...

A bientôt Rosa

C'est comme tu peux quand tu veux!

Bisous

Écrit par : noelle | jeudi, 18 juin 2009

Toujours discret et prudent dans tes commentaires mon cher Rony ! Pourtant le Che !!!

Écrit par : Rosa à Rony | jeudi, 18 juin 2009

Merci d'avoir souligné avec discrétion ma faute de frappe. Je me suis beaucoup énervée sur cette note à cause de la présentation qui ne me convient mais dont le logiciel refuse d'enregistrer la modification.
L'allusion aux système d'actions n'est pas étonnante.
Dupestre, avec les Duvalier en Haïti et les la colonisation de Cuba par les USA sous Batista, avait eu de quoi observer le capitalisme dérèglé et ses conséquences.
D'autre part le Che avait été directeur de la banque nationale au début de la mise en place du gouvernement cubain.

Écrit par : Rosa à Alsa | jeudi, 18 juin 2009

Toujours plus sensible aux photos qu'aux mots du poète !
Ceci dit moi aussi ces photos m'inspirent, surtout celle remarquée par PAG.

Écrit par : Rosa à Doume | jeudi, 18 juin 2009

Lyrisme oui mais aussi poésie épique qui me rappelle beaucoup Hugo ou Aragon. Sans doute pour l'engagement politique.
Depestre a moins écrit sur la négritude que Césaire (même s'il a produit aussi de très beau textes).
Il est plus révolutionnaire au sens universel du terme. Il est extrêmement attaché à son identité caribéenne mais pour en célébrer la sensualité.
Il est soit dans la colère soit dans la célébration de la vie.

Écrit par : Rosa à Edith | jeudi, 18 juin 2009

J'espère que tu ajoutes les mots aux photos.

Écrit par : Rosa à Louis-Paul | jeudi, 18 juin 2009

"Nous ne serons jamais plus aussi heureux, jamais"

Celia Sanchez (épouse de Fidel Castro, décédée assez jeune)
Ces propos sont rapportés dans l'excellente biographie du Che par Pierre Kalfon, très bien écrite et passionnante.

On aurait pu dire la même chose en mai 68 : malgré les dérives (comme à Cuba). Ces heures magiques ont existé et jamais personne ne pourra les retirer à ceux qui les ont vécu. Plus intenses bien sur pour les "Barbudos" et leurs compagnes.
Donc PAG et plus que jamais VLR !

Écrit par : Rosa à PAG | jeudi, 18 juin 2009

Pourquoi discret ? et qui plus est prudent ?
La d"couverte pour moi, c'est René Depestre qu'à ma grande honte j'avoure ne pas connaître, et tu m'en as donné l'envie.
Quant au Che, évidemment !

Écrit par : rony à Rosa | jeudi, 18 juin 2009

Brothers, un pavé ! à lire pour les vacances !
à bientôt Noelle, bon séjour au frais et peut-être...

Écrit par : Rosa à Noelle | jeudi, 18 juin 2009

Oui Rony, mais je pensais que tu commenterai un peu sur la Révolution.
Pourquoi honte ?
J'ai découvert Depestre il y a deux mois et je trouve scandaleux que les
instances de la Francophonie ne fassent pas leur travail.
Certainement un poète francophone de talent et d'envergure qu'on devrait pouvoir lire à l'école.
Voilà pourquoi je suis très motivée pour le faire connaître.

Écrit par : Rosa | jeudi, 18 juin 2009

Je t'avais promis des nouvelles de ma lecture de Yu Hua : en guise "d'échauffement", j'ai commencé par lire "Vivre" et j'ai été vivement intéressée par cette chronique de la condition paysanne depuis le Tchang Kai Chek et le Kuo Min Tang jusqu'à nos jours, et ce personnage de Fugui, si brutal, odieux au départ,(on frémit à l'évocation de la condition féminine)et qui finalement se révèle plus sensible et aimant qu'on ne l'aurait cru. J'attends avec impatience de découvrir "Brothers". Je suis bibliothécaire (en section jeunesse) et j'ai pour habitude de d'abord emprunter les livres avant de les acheter quand je décide, que non, je ne peux plus m'en séparer. Ce sera peut-être le cas pour "Brothers". Merci encore de ton conseil

Écrit par : Edith | jeudi, 18 juin 2009

Les mots du Che me sont familiers, je découvre grâce à toi ceux du poète.

Écrit par : LP | jeudi, 18 juin 2009

Edith
si tu es bibliothécaire en section jeunesse va sue le blogue de mon ami Ashab le libraire (lien dans les blogues lyonnais)
il est spécialiste d'un rayon jeunesse et a essayé de m'entraîner dans les prix des Incorruptibles mais je n'ai pas accroché.
Vivre est un des rares livres de Yu Hua que je n'ai pas lu mais je le faire pendant les vacances car tu me donnes envie de le lire.

Écrit par : Rosa à Edith | vendredi, 19 juin 2009

Louis-Paul
bien sûr que je savais que tu connaissais les mots du Che.
As-tu lu sa biographie de Pierre Kalfon ?
Remarquable, très bien écrite.

Écrit par : Rosa | vendredi, 19 juin 2009

je note : remarquable"... à propos de lire Rosa, je lis beaucoup en rapport avec le temps que je peux y consacrer, mes lectures sont plutôt du côté poésie en plus mais en général je m'abstiens de commenter des lignes lues ...
Ceci étant les quatre premiers vers se terminent par une description d'un "état des choses" qui me semble rester du domaine de l'utopie, encore aujourd'hui, mais qui sait ? l'homme finira différent un jour...
je ne connais pas Depestre... 1971 l'année de "mon" bac...
j'ai donc raison de mettre "Bac + 38" sur mon CV !! (inutile d'ailleurs, maintenant... mon CV )
bon vendredi, qui en général est une bonne journée !
;-Doume

Écrit par : Doume à Rosa | vendredi, 19 juin 2009

Bien fait de passer par ici aujourd'hui, moi. Bises, Rosa.

Écrit par : xavier | dimanche, 21 juin 2009

Confuse également : je ne connaissais pas... Mais je suis loin d'être une référence en matière de poésie (c'est peu de le dire) ! Du coup, je suis allée voir sur divers sites qui il était. L'homme est intéressant, n'hésitant pas à se remettre en question (notamment par rapport au castrisme et à son évolution : il faut dire qu'il fut écarté par le régime dès 1971).

Ne l'opposons pas à Aimé Césaire : il a écrit en 1994 à son propos un texte "Le petit matin d'Aimé Césaire" qui met l'accent sur le rôle essentiel joué par le dramaturge, historien et poète, texte que l'on peut trouver ici : http://www.republique-des-lettres.fr/10378-aime-cesaire.php

Le poème reproduit ici est beau mais il me touche peu : je n'aime guère les panégyriques militants quel que soit le sujet de l'éloge (comment ne pas aimer le Che ?). Mais je vais essayer de prendre le temps de découvrir d'autres textes de René Despestre.

Écrit par : Dominique | dimanche, 21 juin 2009

Dominique, je n'oppose pas Depestre à Césaire : je regrette seulement qu'il soit moins connu. Cela me met en colère. Oui l'homme est intéressant, engagé, se remettant en question, aimant les femmes et les plaisirs de la vie. Capable de colère, d'amour et d'émerveillement.

Xavier contente de te retrouver et Doume qui aime la poésie, je n'en suis pas étonnée.

Écrit par : Rosa | dimanche, 21 juin 2009

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