lundi, 04 juin 2007
Roman familial
A Lyon se tenaient les Assises Internationales du Roman, dans un lieu magnifique, un ancien fort restauré en bord de Saône : Les Subsistances.
J'avais réservé ma place pour la rencontre sur le roman familial, thème qui m'intéressait particulièrement.
Comble de l'ironie, j'ai expédié, ce dimanche, le repas de la fête des mères pour assister à cette table ronde où l'on a dit ... beaucoup de mal de la famille.
Première auteure intervenante, Zeruya Shalev, écrivaine très célèbre dans son pays : Israël. Passionnante.
En effet "Comment peut-on vivre dans un pays tellement politisé et écrire sur la vie de famille ?" nous a-t-elle dit. Pourtant là est sa quête : le couple, la famille, l'intime. En Israêl le modèle familial est imposé par la Bible et ses histoires familiales fondatrices. "Nous naissons et grandissons dans l'ombre d'une histoire familiale vieille de milliers d'années." Je pense que je lirai son livre :"Thèra"
Après elle intervention d'une autre écrivaine, l'américaine Rikki Ducornet. Alors là, je zappe. Je n'ai pas compris ses histoires présentées comme oniriques mais faisant large place à la scatologie.
Elle fut suivie par un Danois, Jens Christian Grondahl lui aussi très intéressant car, se confrontant à l'auteure israélienne, il a fait ressortir que son pays ayant, au contraire d'Israël, échappé à l'emprise de l'Histoire, la famille n'en avait pas été épargnée pour autant. L'individu doit fuir le cercle familial, contraignant, pour aller vers des affinités électives. Tout en reconnaissant que la famille est le lieu de rencontre de l'individu et de la société, car elle permet de défendre la langue individuelle contre la langue sociale. Remarque pour cet écrivain danois : il parlait un français excellent...
Enfin est intervenu le jeune écrivain français, un vrai surdoué : Christophe Honoré également cinéaste, auteur du film "Chansons d'Amour" dont j'ai parlé il y a quelques jours.
On a assisté à un changement de génération par rapport aux écrivains précédents. C'était le seul d'ailleurs dont j'avais lu le roman "Le livre pour enfants". Un curieux titre qui l'a amené à parler de son itinéraire, de lecteur d'abord. Hervé Guibert, dont les romans ont constitué sa "famille originelle", une famille de fantômes a-t-il précisé. Il s'est présenté comme un écrivain "fossoyeur" "vicieux et sentimental".
Il a expliqué son passage par la Littérature pour enfant, le livre pour enfant, rencontre d'un adulte et d'un enfant, crée d'autres liens que les liens du sang.
Je vous épargne les réponses aux questions sinon pour signaler deux échanges intéressants.
L'un entre le Danois et l'Israélienne par rapport au poids de l'Histoire sur la famille et leurs romans : apparemment Zeruya Shalev rencontre des critiques en Israël.
Le second échange, remarquable, a été entre l'Américaine Rikki Ducornet et Christophe Honoré. L'Américaine semble faire une large place dans ses livres aux enfants abusés. Christophe Honoré a dit préférer "les enfants qui abusent"... Ajoutant, qu'en tant que cinéaste il n'imaginait même pas faire tourner un acteur enfant dans le rôle de l'enfant abusé. J'ai trouvé que c'était lui qui, finalement, avait la vision la plus saine de la famille...
Il s'est présenté comme un fossoyeur et profanateur, la mort semble très présente dans son oeuvre : événement fondateur sans doute. Pour ma part dans son roman j'ai vu davantage Antigone, un enfant désemparé avec le cadavre de son père sur les bras ...
Curieuse fête des mères quand même !
00:30 Publié dans Chronique lyonnaise | Lien permanent | Commentaires (34) | Facebook | Imprimer
Commentaires
Un bel article pour un sujet vraiment important oui, même pour un jour de fête des mères! Ta dernière phrase me fait sourire d'ailleurs! Interessant ce débat sur la place de la famille et la façon pour les écrivains de s'en débarrasser parfois...
PS : alors comme ça je suis charmant, hm?... ;-)
Écrit par : L.Myster | lundi, 04 juin 2007
Mais oui tu es charmant Myster, d'autant plus que tu sais quelle place particulière tu as dans ce débat, place que nous tenons tous d'ailleurs...N'en fais quand même pas trop dans le lèche-blog !
Et n'oublie pas que j'attends toujours ton billet sérieux...
Écrit par : Rosa | lundi, 04 juin 2007
juste pour mieux comprendre les termes du débat. C. Honoré préfère les enfants qui abusent, plutôt que les enfants abusés. Tu veux dire, qu'il préfère parler d'enfants qui poussent le bouchon un peu loin, plutot que de parler d'enfants abusés ? est-ce ça ?
mais en quoi est-ce plus ou moins sain, que de parler des enfants abusés ? Les enfants abusés, cela parle de relations perverses, une vie familiale comment dire, paroxystique ... mais il faut en parler,non ? Si C. Honoré n'en parle pas, c'est qu'il n'en éprouve pas le besoin, que cela ne rencontre pas sa propre histoire et si cette américaine ( que je ne connais pas) en parle, c'est qu'elle pressent qu'il y a dans les enfants abusés, une sorte de point d'orgue de ce qu'une relation familiale est capable d'engendrer... et c'est peut-etre un constat que l'on se doit de faire. ?
Écrit par : gaspard | lundi, 04 juin 2007
En fait il s'agissait d'un débat entre écrivains et non entre psy, c'est-à-dire professionnels de la souffrance humaine.
Ce débat est arrivé suite à une question du public qui a un peu trop orienté vers le déballage psy dans lequel s'est engouffré l'écrivaine américaine. Christophe Honoré, qui a commencé en Littérature par des livres pour enfants, a voulu,
me semble-t-il, (mais il faudrait pouvoir lui demander) recadrer sur le plan littéraire... Cela ne voulait pas dire qu'il ne fallait pas parler des enfants abusés mais que de la part d'un écrivain en Littérature cela pouvait attirer une lecture malsaine.
D'ailleurs il a eu une image intéressante, il a parlé de "littérature de parents d'élèves". Pour te dire quand j'ai vu que l'assistance faisait rebondir le propos sur l'analyse psy, j'ai quitté la salle car je n'étais pas venue à une émission de Mireille Dumas...
Écrit par : Rosa | lundi, 04 juin 2007
j'adhère pas vraiment à cette distinction, tu sais. La littérature apporte un éclairage différent. Tout ne peut être rejeté dans le domaine du psy. D'autant que les enfants abusés ne sont pas forcément définitivement des gibiers de psychiatrie. Et, je vois mal pourquoi la littérature ne serait pas capable de s'emparer de ça, aussi. Quand on lit Lolita de Nabokov, on adopte le point de vue du bourreau, mais c'est bien la souffrance de Lolita qu'on voit au final. Et je me dis que ça peut apporter bien plus que cent analyses psychiatriques et mille mireille dumas ...
Écrit par : gaspard | lundi, 04 juin 2007
C'est ton point de vue Gaspard, mais le romancier a le droit de faire cette distinction...
En ce qui concerne Christophe Honoré, que je ne veux pas avoir l'air de défendre à tout prix, je pense que du fait qu'il a commencé avec la littérature pour enfant ce qui crée, avec l'enfance, une relation particulière, il a sans doute voulu dire que travailler sur le pathos ne l'intéressait pas...
Je lirai Lolita de Nabokov car je ne l'ai jamais lu.
Tout le monde n'est pas capable d'adopter le point de vue du bourreau...même si ce point de vue est nécessaire.
C'est vrai aussi que la romancière américaine ne m'est pas apparue très convaincante dans sa manière d'aborder la souffrance des enfants... Même s'il y avait une vérité dans son roman "Gazelle" : à savoir que les enfants sont victimes du pouvoir des adultes. La présentation qu'elle a faite était très confuse... A la fin de sa présentation elle a fait un amalgame auquel je n'ai rien compris avec le réchauffement climatique et autres catastrophes écologiques...
J'ai au contraire été intéressée par le propos de Christophe Honoré sur un NOUVEAU rapport à l'enfance en littérature : l'enfant devient, a-t-il dit, un "sujet parlant", ce qu'il n'était pas auparavant.
Voilà pourquoi je pense qu'il préfère "les enfants qui abusent"
Je dois te dire que je ne suis peut-être pas très objective car moi aussi j'ai toujours été attirée par les "garnements".
En tout cas merci de venir débattre : ça m'intéresse !
Je te signale au passage que Christophe Honoré est breton comme toi me semble-t-il...
Écrit par : Rosa | lundi, 04 juin 2007
Pour connaitre un petit peu Christophe Honoré et son oeuvre littéraire, je peux ajouter qu'il part d'un postulat tout simple : en littérature jeunesse, l'enfant est presque toujours présenté comme un héros, ou au moins un personnage positif. Il ne croit pas une seconde que dans la réalité les enfants soient forcément des anges et raconte donc des histoires où les enfants ont aussi des défauts, sans pathos. Sujet un peu tabou visiblement encore aujourd'hui, puisque toutes les associations familiales rejettent ses livres parce qu'elles les trouvent malsains (comme ceux de R.Dahl par exemple, et on est prié de ne pas rire!). Je trouve juste moi qu'il ne se moque pas du monde en présentant les enfants comme ils le sont vraiment.
Quant aux enfants abusés, je pense effectivement qu'il faut bien connaitre le sujet avant de l'aborder. Il l'a fait une fois, dans un roman pour adultes qui s'appelle "La douceur", où les enfants sont à la fois bourreaux et victimes.
Écrit par : L.Myster | mardi, 05 juin 2007
Merci Myster pour cette précision, tu connais l'oeuvre de Christophe Honoré mieux que moi. J'espère que Gaspard appréciera.
Écrit par : Rosa | mardi, 05 juin 2007
bon, évidemment, je n'ai jamais dit qu'il "fallait absolument" qu'il parle des enfants abusés ... je disais juste que c'est un sujet qu'on n'a pas non plus à s'interdire, dans la littérature .. mais vous m'aviez compris.
En effet, je crois que C. Honoré est de Rennes, mais je n'ai rien lu de lui.
En ce qui concerne Lolita, Rosa, c'est un livre qui met également mal à l'aise. Il y a des gens qui le détestent ou qui disent (a mon sens) des énormités sur ce livre. Il y a énormement de malentendus sur Lolita. Mais si tu le lis, tu pourras lire également après, "Lire Lolita à Téhéran " de Azar Nafisi, une femme iranienne, professeur de littérature... je me retrouve totalement dans sa lecture de "Lolita" et dans la façon qu'elle a de montrer que la fiction éclaire le réel. En l'occurrence Lolita permet aux femmes iraniennes d'avoir un régard sur l'oppression qu'elles ont elle-même vécu. c'est passionnant.
Écrit par : gaspard | mardi, 05 juin 2007
Merci Gaspard... J'avais bien compris tes interventions et je suis contente du com de Myster qui précise ce que j'avais pressenti dans l'intervention de Christophe Honoré que tu auras peut-être l'occasion de rencontrer à REnnes. Pour avoir bavardé quelques minutes avec lui à l'occasion de la séance des signatures, je peux te dire qu'il est très sympathique... Le genre qui dit des choses intelligentes sans se prendre au sérieux et de plus j'ai cru comprendre que ce n'est pas ..."un fils de" ce qui devient rare en tout cas au cinéma.
Bon attention les gars, grâce à vous mon blog va devenir un blog littéraire malgré ce qu'a dit un certain Stalker (blog sur Hautetfort) dans une émission de radio (très confidentielle)
La blogosphère c'est à 99% de la M**** (excusez-moi je suis d'une génération qui ne disait pas de gros mots, alors les écrire...) donc je suppose que que lui seul fait le 1% qui n'en est pas...
Écrit par : Rosa | mardi, 05 juin 2007
C'est vrai pour que mon blog devienne vraiment littéraire, il manque Ashab !
Écrit par : Rosa | mardi, 05 juin 2007
bon plusieurs choses. Moi dimanche j'étais avec mon père qui avait 66 ans et pas toutes ses dents. Famille que j'ai quitté à l'âge de 17 ans pour vivre ma vie parce qu'ils avaient un grand défaut : penser à ma place. Mais je suis content qu'on est parlé de Guibert et moi je vous invite à lire ses premiers livres chez Minuit très peu connus et vous signale la parution d'un inédit dans l'imaginaire. Dans tout ce que vous dites il y a beaucoup de choses peut être trop. Pour ce qui est de la censure passive que font "les parents" autour de Christophe Honoré c'est vrai. Il n'est pas le seul. Le monde des enseignants des libraires et des bibliothécaires développent une maternisation extrême malseine et nocive. A l'heure actuelle beaucoup d'idiots avec un minimum d'efforts peuvent acceder à des postes qui ne sont pas sans conséquences pour les autres. Interessant la problematique famille / environnement socio politique. Il est vrai qu'ici, nous allons plus vers vers les affinités electives. Mais attention encore faut-il se mefier de la reproduction des mêmes travers dans les groupes d'amis ou le couple comme si les gens n'avait jamais coupé le lien. Je suis souvent etonné n'ayant plus ma mère et donc tres peu de rendez vous familiaux de voir des guerres larvées qui durent parfois dix ans, cela m'amuse parce que je n'en ai plus l'habitude mais difficile de faire evoluer un rapport toujours... Je pense écrire un jour pour ma part pour la jeunesse sur mon statut de parent isolé parce qu'avoir des enfants (un) amene beaucoup d'eau au moulin sur tout ça et etre le seul parent interroge enormement.... bref je parle de moi mais il me semble que le roman familial est si individuel. Pour ce qui est de Shalev lire sa trilogie dispo en folio et pour ce qui est de la douceur, vous aurez la chance de le lire sans une ambiance critique nauséeuse qui ne saisit jamais l'essentiel quand une oeuvre est forte, originale, compacte... Jusqu'ou un enfant est-il capable d'aller pour prouver son amour !?
Écrit par : ashab | mardi, 05 juin 2007
Cela devait vraiment être passionnant ! Une belle journée.
J'ai beaucoup aimé ton billet. Merci.
(Moi je ne célèbre pas la fête des mères ! je ne marche pas dans toutes ces histoires de fêtes commerciales et imposées !)
Écrit par : Fauvette | mardi, 05 juin 2007
ashab tu en as plus dit aujourd'hui que durant plusieurs mois sur ton blog
Attention tu commences à te dévoiler !
Tu connaissais Shalev ? Quel écrivain ne connais-tu pas !
D'accord pour Guibert, il faut lire ses premiers romans...
Je vais encore devoir fair chauffer ma carte bleue dans ta librairie !
Fauvette, c'était une fête des mères inédite : cette fête n'est pas forcément commerciale.
Écrit par : Rosa | mercredi, 06 juin 2007
J'en profite pour me dévoiler aussi : j'embrasse ma mère qui n'a pas internet! ;-)
Écrit par : L.Myster | mercredi, 06 juin 2007
Deleuze décrivait cette tendance contemporaine du roman familale comme des "petites histoires". On a parlé des parents d'élèves mais parlons également des profs et des libraires qui classifient la littérature, littérature familiale, enfantine, policière...adorent les réunions à thème et les débats. Les sujets, les genres...ne font pas les grands écrivains. Au secours, Nabokov et Guibert ne sont pas des écrivains familiaux. Leur style et posture littéraire ont marqué la littérature. Quant à chercher un bourreau dans Lolita cela revient pour moi à la même chose que disséquer un malheureux poème en champs lexicaux. Face à cette perpétuelle agression de la parution des petites histoires personnelles, ceux qui aiment la littérature et les "grands" romans voient parfois flotter au-dessus de cette marée noire encrière La Tache de Philippe Roth ou Siegfried ou l'idylle noire de Mullich, enfin quelques romans à portée universelle. Il y a quelque temps, comme l'on pouvait consulter les premiers chapitres des dernières parutions de Grasset, je m'étais attelée à la tâche que je n'ai pu totalement menée à bien je l'avoue, de tous les consulter. Plus d'un sur deux commençaient par la mort du père, le reste par la mort d'un proche. A une exception, Virginie Despentes, mais face à la description de son verre de bière (un liquide jaune dans lequel des bulles montent à la verticale), j'avoue avoir renoncé et mon enquête qui était devenue plus statistique que littéraire s'est arretée là. Quant à écrire sur la condition de parent isolé, La Vie devant soi qui peut être lu aussi bien par les enfants que par les grands est suffisamment bien écrit que pour qu'on laisse l'actualisation du sujet à la presse féminine et psychologique. Misère, de nos jours tout le monde est quelqu'un.
Écrit par : nef | mercredi, 06 juin 2007
Cette confrontation entre la"petite histoire familiale" et le grand roman à portée universelle n'est pas d'aujourd'hui et les deux genres ont toujours coexisté. Faut-il rejeter Claudine au nom de "Cent ans de solitude" ou "Poil de carotte" au nom d'"Anna Karénine" ? Pour ma part je ne ferai pas ce choix.
Philippe Roth dans ses premiers romans a raconté sa vie et sa famille. Et les romans de Shalev que je n'ai pas encore lus ont certainement une portée universelle. Oser parler de l'intime dans un pays qui semble n'attendre de la Littérature que la parole sur les tragédies historiques, et vouloir en sortir, me semble atteindre la portée universelle...
Tout le monde est quelqu'un : peut-être une dérive en effet mais tout le monde n'est pas forcément capable de raconter ce quelqu'un.
Virginie Desentes comme Christine Angot ou Amélie Nothomb ne me semblent pas aller dans la direction de l'Universel ! On n'est pas obligé d'en rester aux grosses ventes des libraires, surtout celles de Grasset !
Écrit par : Rosa | mercredi, 06 juin 2007
Virginie Despentes cela se voulait de l'humour, cela n'avait rien d'une référence.
Les deux genres ont toujours coexisté mais ils s'entremelaient dans la qualité des écrits. Ce n'est pas moi qui range la littérature en genre. Quand à Grasset c'est une grosse maison assez représentative de notre production de masse nationale.
Que tu puisses penser que l'intime est sous-représenté dans la littérature française actuelle me paraît hallucinant ! Il n'y a d'ailleurs pas qu'en littérature, qu'on s'ingurgite des flots de petites histoires, en cinéma, en théâtre, en arts plastiques, en chanson. La France devient la spécialiste du Moi Je, les genoux en dedans, légèrement décalé (un peu révolté, he oui cela se dose la révolte). Et nous accouchons en chaine de romans microscopiques, de films intimistes et sans profondeur de champ, d'oeuvres d'art minuscules et nombrilistes, de chansons sans voix où les petits riens font tout.
Voilà Rosa, j'aimerais que les gens créent non pas parce qu'ils ont un petit sujet, mais parce que c'est nécessaire pour la littérature, pour l'art, pour le monde. Il y a de merveilleuses exceptions , Le savon de Ponge en est un si ciselé et merveilleux exemple, mais sa légéreté gracieuse tout en exercice de style n'a rien à voir avec tous les récits- témoignages - journaux intimes qui sont écrits par tombereaux dans les grandes et les petites maisons d'édition française et qu'encense les journalistes et les libraires. Ils sont émus et se sont identifiés à ces petites histoires, écrites avec une petite encre d'un tout petit style d'auteurs qui croient faire du Proust. Tu citais Colette, mais rien ne les arrête, ils croient faire du Proust.
Écrit par : nef | mercredi, 06 juin 2007
Je n'ai absolument pas laissé enrtendre que je pensais que l'intime était sous-représenté... Je déteste au contraire le nombrilisme qui sévit en France. Si tu as lu mon blog tu as dû constater que j'aimais la littérature chinoise qui précisément est aux antipodes de la littérature française actuelle.
J'ai cité cette auteure israélienne parce qu'il m' a semblé que dans son cas c'est en écrivant sur l'intime qu'elle rejoint l'universel...
En ce qui concerne le cinéma je pense qu'il faut l'envisager différemment...
Je me souviens des productions des années 70 où, au théâtre comme au cinéma, les spectacles étaient tellement intellos qu'on se faisait vraiment chier...
Sans doute n'as-tu pas apprécié mon goût des jeunes cinéastes mais au moins avec eux je ne m'ennuie pas...
Quant à Francis Ponge dont on peut goûter l'esthétisme et que j'apprécie en tant que poète son exemple ne peut être mis en comparaison de romans.
Ceci dit je suis d'accord avec toi sur les maisons d'édition qui publent ce qui est petit
mais le petit est à la mode
le petit est même à l'Elysée
avec une saga familiale qui a valeur de norme.
Bon de toutes façons je lis peu de littérature française... La pire escroquerie littéraire tu ne l'as d'ailleurs pas citée, c'est Philippe Delerm...
Écrit par : Rosa | mercredi, 06 juin 2007
Même si j'ai toujours eu du mal avec les généralités, je lis hélas aussi peu de romans français, pour les mêmes raisons que vous. Et même ceux qui essaient de toucher à quelque chose de plus vaste que l'intime, par exemple Gavalda dans "Ensemble c'est tout" ne m'interessent pas, parce qu'il manque à mon sens l'essentiel : le style.
D'accord avec toi pour La Tâche. Je te conseille aussi la lecture de David Mitchel, soit Ecrits Fantomes, soit son dernier, Carthographie des nuages. Sinon, Tom Wolfe reste une référence d'aujourd'hui.
Enfin, je ne sais pas si on peut parler d'escroquerie littéraire à propos d'une ouevre, si? Ca me gêne toujours, mon naturel optimiste fait que je ne doute pas de la sincérité des auteurs, quoi qu'ils publient. Même Delerm, hélas.
Bon, c'est que mon avie hein!
Écrit par : L.Myster | mercredi, 06 juin 2007
C'est vrai que "escroquerie"est un peu fort...Comment dire alors ? Un auteur qui vend des milliers d'exemplaires d'un livre qui a un bon niveau de "rédaction" d'élève de ... troisième ?
Je n'exagère pas : j'ai retrouvé mes cahiers de "compositions mensuelles" de CM2 et c'était presque du Delerm.
Finalement Gavalda, c'est plus intéressant : "Ensemble c'est tout" a été un bon scénario de film.
Écrit par : Rosa | mercredi, 06 juin 2007
Entièrement d'accord avec toi pour Delerm. C'est agréable à lire comme une bonne rédac. Miantenant tant mieux pour lui si ça a marché, mais... C'était la mode (ça n'a heureusement pas duré) de la littérature des petits riens. J'avais beaucoup aimé dans cette mouvance un livre dont j'ai oublié le titre et l'auteur, qui racontait l'histoire d'un maçon qui tombait amoureux d'une institutrice. Bon, je reviendrai quand la mémoire me sera revenue!
PS : tu es enfin en lien.
Écrit par : L.Myster | jeudi, 07 juin 2007
Merci pour la dénomination du lien.
Je réfléchis d'ailleurs à un changement de nom, choisi dans un contexte qui n'existe plus....
Écrit par : Rosa | jeudi, 07 juin 2007
Excuse moi Rosa, je n'étais pas agressive avec toi mais vis à vis de l'art français qui se recroqueville de plus en plus. Marre du petit (surtout à l'Elysée). Quant aux Delerm (eh oui son homonyme dans la chanson est à classer dans la même catégorie), agréables leur convient moins bien que mièvres.
J'adore le cinéma intello des années 70, même si j'ai laché Godard pendant des années, j'ai été contente de retrouver son humour dans Notre musique, il m'avait manqué. En échange de Cartographie des Nuages de Mitchell, je vous conseille un cinéaste anglais maudit mais passionnant Peter Wadkins (The Bomb, un film commandé par la Sécurité civile anglaise sur la prévention en cas de conflit atomique, interdit de diffusion par la BBC, Punishment Park, un documentaire fiction qui part du principe que Nixon aurait instaurer l'état d'urgence aus States pendant la guerre du Vietnam et que les pacifistes n'ont que deux choix la prison ou punishment park, Munch, le plus beau film jamais fait sur la création artistique, rayé par la productrice du film, restauré 30 ans après). Tu verras Rosa que le cinéma intello des années 70 peut être formidable et je te garantis le zéro ennui.
J'aime cependant quelques cinéastes français contemporains comme Desplechin, Audiard et d'une autre génération Bertrand Blier.
Sur le roman, à lire et à relire Le rideau de Kundera.
Si tu peux me conseiller des auteurs chinois, je serais ravie.
Je ne sais pas si vous connaissez des auteurs coréens, mais j'ai été subjuguée il y a quelques années par la qualité de leur cinéma, j'aimerais découvrir leur littérature.
Écrit par : nef | jeudi, 07 juin 2007
moi je oui moi je suis libraire et je ne passe pas mon temps à classifier ,et, prendre sa famille comme sujet est bien souvent fondateur parce que c'est ce qui fonde chaque etre plus que chaque individu comment expliquer par exemple que j'ai vécu la plus belle enfance qui soit et dire qu'elle est belle ne suffit pas à la raconter. Et qu'avec les mêmes parents qui ne sont pas des gens insignifiants et tout aussi universels, à l'adolescence quelque chose n'est pas marché. Ce n'est pas un sujet de café du commerce et plutot un sujet litteraire tellement les ramifications de chaque histoire fondent une vie. Moi j'aime tout autant la litterature universelle que ll'histoire des gens parce qu'ils me sont aussi chers et précieux que les livres. Et mettre le fait qu'on fasse commerce de tel ou tel chose et des sujets plus serieux ne permet pas de parler de ces choses là. La lecture est une expérience et plusieurs expériences sont tout le temps possibles comme avec les tu les vous et les moi je. Chaque etre est un possible et il n'a pas à être par la coexistence d'universels quelconques.... merci nef
Écrit par : ashab | jeudi, 07 juin 2007
Pour Delerm j'ai oublié de vous parler d'un tres bon pastiche "la premiere gorgée de sperme" (pardon rosa) et ne vous deplaise je ne renierais jamais ma lecture de "baise moi" restes à savoir si le monde qui est le notre vous interesse vraiment... et tout simplement la litterature peut etre aussi juste une lecture du monde si on ne les deforme pas ou ne leur donne pas une autre valeur que la leur.
Écrit par : ashab | jeudi, 07 juin 2007
ashab ! je ne comprends pas le sens du "pardon Rosa"! Tu ne vas quand même pas me faire passer pour une vieille dame pudique ! Sutout que j'adore les parodies.
Comme toi moi aussi je n'aime pas les classifications...
Quant aux petites choses, on dit que la grande Duras elle-même publiait tout de sa vie sauf sa liste de courses.
A propos des "moi, je" il y en a que j'aime beaucoup comme Annie Ernaux ou Michel del Castillo peut-être parce que leur "moi, je" rejoint le mien...
L'autofiction est un genre à la mode et ce n'est pas une raison pour lui trouver tous les vices. Après tout c'était un objet d'étude au BaC jusqu'à ces dernières années.
Chaque époque a ses modes littéraires et elles sont intéressantes comme reflet de leur époque.
De toutes façons avec Dantec l'autofiction est en passe d'être supplantée par la Sience fiction (en tant que phénomène de mode)
Nef, je ne me suis pas du tout sentie agressée et au contraire j'apprécie que tu aies donné à chacun l'occasion de clarifier ses goûts et intérêts littéraires.
En revanche je persiste pour le cinéma : Godard est peut-être revenu à un cinéma plus accessible mais je ne suis pas retournée voir aucun de ses films depuis que je suis sortie de "Week-end" en pleine séance : la seule fois de ma vie ! Et Robert Bresson !
Ensuite il y a diverses tendances dans le cinéma mais j'aime vraiment les jeunes : ils ont quelque chose à dire et le font de façon à la fois profonde et divertissante comme "Chansons d'amour" ou les films de Klapisch (plus très jeune d'ailleurs mais pour la vieille dame que je suis, n'est-ce pas ashab)
Écrit par : Rosa | jeudi, 07 juin 2007
Rosa, te rappelles-tu que tu avais peur de faire cet article de peur qu'il ne soit pas lu et en pensant que tu n'aurais pas un com?!...
Je souris, et je te le réaffirme avec force : tu es une Pythie nulle!!
Écrit par : L.Myster | vendredi, 08 juin 2007
Je t'assure Rosa que tu peux regarder notre Musique. La scène finale des GI en train de garder le paradis vaut à elle seule de te détourner momentanément des jeunes réalisateurs. Je recommande au passage pour ceux qui ne l'aurait pas vu, amateurs de cinéma et de littérature L'extension du domaine de la Lutte de Philippe Harel, avec Harel, excellent et Garcia extraordinaire. Une adaptation du livre de Houellebecq meilleure que le roman. Et mes écrivains coréens ?
Qui pense que Mitterrand 2007 est Orsenna ?
Écrit par : nef | vendredi, 08 juin 2007
Merci Rosa. Est-ce que tu as lu beaucoup Orsenna ? As-tu remarqué si il emploie fréquemment le terme zozo ?
Écrit par : nef | vendredi, 08 juin 2007
nef m'ignore tant mieux... Orsenna n'est pas assez ... pour etre mitterand 2007 !
Écrit par : ashab | vendredi, 08 juin 2007
J'avoue préférer la littérature ample à celle de l'intimité.
La famille ? Les Rougon et les Macquart. Ou la famille toujours éclatée chez Victor Hugo.
La famille venimeuse du Noeud de Vipères de Mauriac.
La famille redoutable des "parents pauvres" de Balzac, en particulier celle, vénéneuse aussi, du "Cousin Pons", sans oublier les adorables et effrayantes filles du Père Goriot.
En relisant Moravagine, de Cendrars, histoire de ce prince austro-hongrois qui devient un dangereux tueur en série, je songe aussi à l'extravagante famille du Solal d'Albert Cohen, autre esprit tourmenté et perdu.
Et enfin, la famille implosive des Thibault de Martin du Gard.
Écrit par : Hervé Torchet | samedi, 09 juin 2007
Hervé vous confirmez ainsi qu'on peut écrire un roman sur la famille sans pour autant parler de l'intime
D'ailleurs l'intime a eu sa place aux Assises avec une table ronde intitulée"Moi, je " avec l'incontournable Christine Angot.
J'avais même prévu une note mais il me semble qu'on en a assez parlé...
Hervé quel dommage que vous ne parliez plus littérature sur votre blog... Vous le faisiez de façon tellement plaisante.
Peut-on espérer qu'après les législatives vous y reviendrez ?
Écrit par : Rosa | samedi, 09 juin 2007
Bon, elles ont pas un peu fini les groupies de Rosa?! ;-)
Écrit par : L.Myster | samedi, 09 juin 2007
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