jeudi, 06 août 2009
Le "Boulé" ou le "Soufflé" ?
Retour d'un court séjour de 48 heures chez une amie de jeunesse, en compagnie d'une autre amie commune.
Accueil dans une maison savoyarde, dans le massif de Belledonne. Une de ces maisons où restent inscrites les marques de chaque génération. Admirez monsieur Rosa qui s'est retrouvé en compagnie babillarde de trois ex soixanthuitardes posant sans concession des regards critiques sur les années écoulées.
L'amie accueillante n'ayant pas encore ramassé ses groseilles, fort abondantes et fort appétissantes, ce fut l'occupation d'une bonne partie de l'après-midi.
Le lendemain, on se mit à la gelée.
Rituel long autant que solennel.
Installer la balance de pesée : un monument.
Je vous laisse juger.
Mais c'est finalement plaisant de retrouver tous ces poids de cuivre et de fonte pour parvenir à l'équilibre.
Plus que l'aspect froidement technique d'un nombre qui s'affiche, c'est bien de ce fragile équilibre entre les deux plateaux de cuivre qu'il s'agit.
Mais la pesée ce n'était rien à côté de la fabrication ancestrale, soigneusement consignée dans un carnet et modifiée au fil des ans sur des bouts de papier volant. Tout le savoir-faire de plusieurs générations. Il fallut faire crever les groseille puis laisser le jus s'écouler à travers un tamis. Ne pas les presser pour que le jus reste clair. Le plus pectaculaire pour moi fut le travail du "boulé". En l'occurence du "souflé". Le jus de groseille étant cuit dans un sirop de sucre, il y a deux méthodes pour vérifier qu'on est parvenu au stade souhaitable de la cuisson.
"Quand le mélange sucre-eau entre en ébullition, le sirop devient clair et translucide.
Il est au perlé ou nappé quelques minutes après l'ébullition, quand des perles rondes, de plus en plus grandes, viennent éclater à la surface.
Il est au boulé quand quelques gouttes de sirop versées dans un bol d'eau froide peuvent être rassemblées en une boule molle sous les doigts. On appelle aussi ce stade le soufflé car si l'on souffle à travers l'écumoire trempée dans le sirop, il se forme des bulles."
Marie-Paule Bernardin "Confitures, gelées et chutneys"
C'était l'habitude de mon amie.
Technique délicate.
On éclabousse partout et il faut souffler fort.
En fait il existe une méthode plus simple... mesurer la température du sucre en ébullition avec un thermomètre adéquat.
Mais ce serait perdre la magie d'un geste venu de la nuit des temps. Et surtout on se serait privées de fou-rires inénarrables. "Si on nous avait dit en 68 (que nous n'avons pas vécu ensemble) que quarante ans plus tard on se retrouverait pour faire de la gelée de groseille !"
Le jus de groseille est enfin jeté et saisi dans le sucre brûlant : on repart pour un bouillon, et on verse dans les pots une fabuleuse gelée, claire et chatoyante.
23:19 Publié dans D'une génération à l'autre | Lien permanent | Commentaires (30) | Tags : confiture, lyon, savoie | Facebook | Imprimer
Commentaires
Merci de ce récit. J'adore ça, la gelée de groseilles, quelle patience, il vaut mieux être entre amies, et puis la confiture à l'amitié, ça a un goût irremplaçable. Bonnes tartines !
Écrit par : Nénette | vendredi, 07 août 2009
Nénette je n'utilise pas cette technique pour la gelée de groseille.
Après extraction du jus (avec un extracteur découvert grâce à ma soeur) je mélange et fais dissoudre le sucre et fait cuire deux minutes sur le feu.
La mienne garde plus d'acidité (ce que préfère mon mari, sans doute par habitude) mais moi j'ai préféré celle-ci plus douce.
Je verrai l'an prochain.
Tu es donc à Lyon ?
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
Donc, mention spéciale pour Mr Rosa qui devait bien rigolé en douce... non ?
Et félicitation pour le respect de la tradition du boulé. Je l'ai pour ma part abandonné, faute de patience, de courage, (ou de copines ?) et privilégié une méthode plus expéditive et personnelle... mais je n'ose la révéler ici craignant le tollé des ex-soixante-huitardes conformistes... ;-D
Écrit par : anne | vendredi, 07 août 2009
Pôvre Mr Rosa !
de tout coeur avec toi ...
mais il te reste au moins les Gelées...toi.
Pourquoi ex soixante-huitarde... Soixante-huitarde point !
Écrit par : Z'Yves | vendredi, 07 août 2009
Traditionnalistes Anne plus que conformistes.
Mais j'espère bien que tu me révèleras ta méthode.
Yves ne fait pas le malheureux : tu vis avec la meilleure des cuisinières.
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
Je ne fais pas le malheureux, je compatis par R...
Je mendie peut être un peu aussi !
Écrit par : Z'Yves | vendredi, 07 août 2009
La gelée de groseille ?
Je t'en offrirai volontiers ! La Ch'tite n'en a pas fait ?
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
Non, elle n'aime pas cela...
Écrit par : Z'Yves | vendredi, 07 août 2009
J'écris les étiquettes, je vais en parler à midi avec Mme, je vais revenir lire pour comparer...et peut-être je comprendrais.
...pas seulement les étiquettes j'en mange aussi!
Écrit par : alsacop | vendredi, 07 août 2009
Aucun de nous 2 ne connaissait ces 2 mots, les liant à la gelée de groseille, pour le reste nous procédons comme vous mais vers la plus sucrée ou en mélangeant avec des framboises, donc gelée framboises/groseilles.
Écrit par : alsacop | vendredi, 07 août 2009
Felicitation !quel travail!
Yves aura donc son petit pot!
Bonne journée Rosa
Écrit par : noelle | vendredi, 07 août 2009
Alsa, moi aussi je suis comme toi, je préfère mélangé à la framboise mais monsieur préfère l'acidulé de la groseille et comme je suis une femme docile !!!!Yves, ne rigole pas (je te vois derrière l'ordi !) sinon pas de gelée !
Alsa moi non plus je ne connaissais pas mais comme je les avais lus dans mon bouquin,j'en avais une vague idée mais je n'avais jamais vu faire.
Heureusement qu'il y a les soixanthuitardes pour défendre les traditions !
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
Il faut assumer !
Écrit par : alsacop | vendredi, 07 août 2009
Noelle pour Yves ce sera même un gros pot !
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
Alsa, tu parles des soixanthuitards ?
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
ah bonne sieste, cap'taine en avait bien besoin !!!
D'abord je ne rigole jamais, je me marre dans la barbe c'est tout...
Na na nère ! j'en aurais un gros pot !
En fait chez nous aussi discussion pendant le repas. Je crois que nous préférons la gelée de groseille en préparation culinaire chaude plutôt qu'en tartine.
Écrit par : Z'Yves | vendredi, 07 août 2009
Oui Rosa, je confirme ce qu'Yves disait hier.
Il est à la "mode" de contester les valeurs de 68, de nier les raisons et les conséquences.
Sarkozy est né en 1955 je crois, il ne peut pas connaître, il ne sait pas.
Moi j'écoute toujours pousser mes cheveux!!
Écrit par : alsacop | vendredi, 07 août 2009
Désolée mon cher Alsa mais je ne conteste pas les valeurs de 68, mais nous avons quand même trouvé ça drôle de faire notre gelée à l'ancienne tout en discutant précisément des dites valeurs.
D'ailleurs l'une des copines précisément avait fait sa rentrée universitaire en novembre 68 avec Seboul à la Sorbonne, l'historien communiste spécialiste de la Révolution française. Il a commencé son cours en en interrogeant quelques uns sur des dates-clés de l'Histoire de France.
Devant leur ignorance il avait traité les étudiants de petits cons prétentieux qui n'avaient même pas été capables de faire une Révolution car, selon ses critères, 68 n'a pas été une Révolution.
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
Je sais Rosa, c'était pour te titiller à cause du ex !
Écrit par : alsacop | vendredi, 07 août 2009
Alsa reconnais que nous sommes tous des ex par rapport à 68.
Et je conçois les critiques.
On nous reproche tout ce qui va mal aujourd'hui...
Écrit par : Rosa | vendredi, 07 août 2009
Dans ma façon de vivre, oui...mais tout à évoluer.
Mais j'ai gardé ce côté rebelle, révolté, sans cesse à la recherche de nouveautés, de changements...
Je refuse de mettre l'ensemble des problèmes d'aujourd'hui sur le compte de 68.
De là à nier 68 comme certains, c'est grave.
Disons qu'un laxisme latent, d'un assistanat pour trop de choses...sont des conséquences négatives de ce mouvement, mais tout le reste est et restera positif.
Les comme Sarkozy nés en 1955 et après, tant pis pour eux.
Écrit par : alsacop | vendredi, 07 août 2009
D'accord avec toi sur tout sauf sur l'assistanat.
C'est plus ancien dans la mentalité française.
Je me demande parfois si cela ne remontrait pas au temps où les cerfs paysans allaient se réfugier dans le château féodal des seigneurs.
Les courtisans de Louis XIV étaient des assistés.
En France les nobles n'avaient pas le droit de travailler ce qui fait que dans les mentalités (voire nos gènes !) le non-travail est considéré comme un privilège.
Écrit par : Rosa | samedi, 08 août 2009
Hasta siempre la liberta utopica !
Mis à part, vous n'avez pas l'impression que depuis la nuit des temps chaque mouvement "révolutionnaire" a été récupéré par les puissances au pouvoir, noblesse, bourgeoisie ou notable, et que le peuple s'est toujours retrouvé cocu comme Grosjean ?
Mais nous sommes loin de la gelée de Groseille...
Écrit par : Z'Yves | samedi, 08 août 2009
Les Belledonnes, mais c'est ce que je vois depuis mon balcon ! Tu me donnes faim, Rosa, je crois d'ici humer les arômes de confiture ! Et 68, petite élève de 3ème, je l'ai vécu à Nantes, avec beaucoup d'excitation, même si, trop jeune pour participer et réellement apréhender.
Toujours aussi agréable de te lire, Rosa...
Écrit par : Edith | mercredi, 12 août 2009
Tu es de cette région ?
l'an prochain je vais te voir !
Curieux Edith, j'étais à Arvillard. Je suis allée chercher de la Roussette chez un producteur de Saint-Jean-de-la Porte, village dont je n'avais jamais entendu parler...
et à mon retour, j'apprends qu'à cet endroit il y a eu ce terrible accident sur un passage à niveau.
Écrit par : Rosa | mercredi, 12 août 2009
J'habite Montmélian, et je connais fort bien St Jean-de-la-Porte. Je sais que tu es originaire de la Haute-Savoie, je connais aussi, (je me suis mariée à Annecy). Et pour l'an prochain, si tu repasses par là, ce serait avec plaisir que nous pourrions faire connaissance "en vrai" un verre de Roussette à la main.
Un accident sur un passage à niveau ? Je rentre juste de vacances et je l'ignorais...
Écrit par : Edith | mercredi, 12 août 2009
Un accident terrible : une dame s'est engagée sur le passage à niveau alors que la barrière était fermée et a été happée par le train. elle avait ses deux fils dans la voiture tués également. On se demande ce qui lui est passé par la tête.
Moi je suis d'Allinges où nous avons eu également un terrible accident de car scolaire l'an dernier.
Écrit par : Rosa | mercredi, 12 août 2009
Il y a quelques jours lorsque j'entendais l'information je pensais aussi à l'an dernier...c'est dingue!
Écrit par : alsacop | mercredi, 12 août 2009
Au château des Allinges, une très belle stèle a été édifiée à la mémoire des 7 enfants et représente 7 étoiles.
Il y a aussi une plaque souvenir pour le prof qui s'était suicidé dans la foulée.
Écrit par : Rosa | mercredi, 12 août 2009
Je me souviens, tu en avais reparlé !!
Écrit par : alsacop | mercredi, 12 août 2009
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