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Rencontre avec Insa Sané
Ashab le libraire m'a donné l'occasion de rencontrer récemment Insa Sané, auteur d'un très joli roman pour d'jeunes (et même vieux ! la preuve !). Il lui a fallu tout d'abord me convaincre : facile ! Ashab me vend ce qu'il veut, je sors toujours de sa librairie enrichie par ses connaissances et le porte-monnaie allégé. Mais c'est un détail. Donc il a dû me convaincre car j'avais horreur de la "littérature" pour ados. Quand j'enseignais, je l'ai toujours évitée même si parfois c'était vraiment très sportif de faire lire des lycéens mâles dans un établissement technique industriel... Cette fois j'ai été séduite complètement par ce petit livre, Sarcelles-Dakar et par son auteur. Ce jeune écrivain qui vit à Sarcelles, a commencé par le Slam et le Rap. Son premier roman est une petite merveille, tout à fait propre à intéresser les adolescents garçons qui n'aiment pas lire. J'ai pensé à vous, Myster et Léa, selon vos futures classes... Il s'agit du parcours initiatique d'un jeune homme -limite racaille- vivant dans une cité. Les premiers chapitres sont parfaitement accrocheurs dans le langage des banlieues. Je fais une parenthèse pour noter un paradoxe : j'ai lu Sarcelles Dakar en même temps que l'Obèle de Martine Mairal qui donne la parole à Marie de Gourmay, éditrice de Montaigne. Livre écrit dans le langage de son époque. J'ai trouvé aux mots, de la banllieue et de Montaigne, la même saveur, celle d'un langage vivant et goulayant... Donc notre héros, obligé par sa mère à partir pour le Sénégal, son pays d'origine, va vivre une véritable aventure intérieure au contact de la culture de ses ancêtres. En fait, dans un pays officiellement musulman, le héros découvre l'animisme, véritable religion et grande culture. Il en reviendra transformé... Après le verlan, place à la poésie et de très beaux chapitres qu'Insa Sané nous a lus chez Ashab en Slam : magnifique. J'en publierai un passage. Si vous avez autour de vous des ados qui n'aiment pas lire, offrez-leur ce roman : ils vont adorer. Pour terminer, hommage au jeune éditeur qui a créé cette collection EXPRIM aux éditions Sarbacane.
Il s'appelle Tibo Bérard. Insa Sané dédicace.mardi, 26 juin 2007 | Lien permanent | Commentaires (10)
Lectures de l'été : premières impressions
Tout d'abord en ce qui concerne le débat sur Dantec (note sur lectures d'été suite ) la palme revient à ses lecteurs et défenseurs. A dire vrai je n'ai pas lu tout ce que j'avais prévu, faute de temps. Je me suis régalée avec "L'Obèle" de Martine Mairal Martine Mairal fait revivre Marie de Gourmay, fille spirituelle et éditrice de Montaigne. Livre savoureux car l'auteure imite à merveille la prose de Montaigne, ressuscitant le langage de cette époque pas encore épuré des mots du terroir : heureusement Malherbes n'était pas encore venu. Mais surtout le roman évoque la situation des femmes "savantes" de cette époque, ridiculisées à tords par Molière. Je sais, vous allez me dire que Molière n'a dénoncé que les excès des femmes instruites, c'est ce qu'on dit pour défendre notre monument national de la Littérature mais à ce jour je n'en suis plus si sûre : lisez "L'Obèle". Histoire de passion : pour la pensée, la littérature. Amour passionné de Marie pour Michel: lui répond par l'amour filial de celui qui a trouvé sa véritable héritière spirituelle, sa fille adoptive. Dévotion de Marie pour le restant de ses jours ; elle suivra l'édition de toutes ses oeuvres, et apparemment ce n'était pas une mince affaire, d'où le titre. L'obèle est une petite croix qui, dans la marge, signale un renvoi à un rajout et apparemment Montaigne en faisait beaucoup. Ainsi ce petit livre a-t-il décidé d'une semaine de vacances dont le contenu n'était pas fixé : j'irai visiter Bordeaux que je ne connais pas. J'ai beaucoup aimé "L'Infamille" de Christophe Honoré.
J'ai préféré ce roman à "Livre pour Enfant" du même auteur. La famille finalement c'est le seul sujet important car nous sommes tous d'une famille et il nous faut vivre avec. Je parle de notre famille d'origine. J'aime le ton du roman qui aborde ce sujet dans la tragédie, le réalisme mais aussi la drôlerie. Des trouvailles inoubiables, comme les cendres du père, cachées après l'incinération dans un sac d'aspirateur. C'est ce que j'aime chez Christophe Honoré, il fouille des êtres dans le plus intime, leur faisant cracher l'inavouable tout en restant dans la banalité de la vie quotidienne. J'adhère à son idée de la famille : un groupe humain, fait de hasard dont on cherche à se libérer mais dont on ne peut se passer. Le roman qui a le plus marqué mon début d'été est "Tokyo" de Mo Hayder. Et je remercie Myster de me l'avoir fait découvrir. C'est un thriller qui repose sur un fait historique abominable, trop ignoré des Occidentaux : le massacre de Nankin. En 1937, les Japonais ont envahi la Chine affaiblie par la décadence de la famille impériale et les guerres que la Chine a subi de l 'Europe durant le XIXème siécle. Les Japonais ont occupé Pékin où ils ont soumis la population de manière humiliante (lire Lao She). Le gouvernement de Tchang Kaï Chek s'étant installé à Nankin, les Japonais sont entrés dans sa capitale de la manière la plus brutale qui soit, massacrant les civils avec une cruauté sans égal dans l'Histoire. Le roman de Mo Hayder, c'est l'histoire d'une jeune anglaise en recherche d'une rédemption pour une faute qu'elle n'a pas commise. Dans sa quête, elle part sur les traces d'un témoin chinois du massacre de Nankin qui vit au Japon. Et c'est là que le roman est magistral : la cruauté de l'armée niponne de 1937 trouve écho dans la cruauté des yakuzas actuels. Tous des monstres. On suit en parallèle l'aventure de la jeune anglaise embauchée dans un club à hôtesses et le journal de décembre 1937 du Chinois dont le secret est bien verrouillé. Il faut savoir aussi que les Japonais pratiquent un révisionnisme terrible par rapport à cet épisode de leur Histoire. Je suis allée sur un site Japonais consacré au massacre de Nankin : j'ai posé une question modérée sur le rapport à la mémoire. Quand je suis retournée ma question avait disparu. à lire absolument. Parce qu'on me l'a offert, j'ai parcouru "L'élégance du hérisson". Bofffff!!!!!! De la veine d'Amélie Poulain avec une bonne tartine de gloubi-boulga philosophico-culturel. Tout ce que je déteste ! J'ai du mal à comprendre ce phénomène de "best seller". Et vous ? vos lectures ?vendredi, 27 juillet 2007 | Lien permanent | Commentaires (38)
J'ai rendu ma copie
Je ne sais pas si mon dernier sujet m'a trop affectée mais je n'avais pas envie de cliquer sur "nouvelle note" ces derniers jours.
Et puis Léopold m'a collé un devoir obligatoire qui a mobilisé mes neurones, enfin le temps où ils étaient mobilisables.
Six livres qui me représentent ? à mon âge difficile. Je ne sais pourquoi les plus anciens me sont revenus plus facilement en mémoire. Donc j'essaie, et tant pis pour toi Léopold si tu es déçu.
Il y a d'abord mes fondamentaux.
Montaigne et Balzac. Montaigne, c'est une découverte scolaire, au lycée. En seconde, j'étais dans un lycée de bonnes soeurs, mon professeur de Lettres était brillante et passionnante mais bien religieuse quand même.
Quand nous avons étudié Montaigne, j'ai perçu chez elle une certaine réticence. Car il y avait un "gros mot" dans les textes de Montaigne et c'était "scepticisme" : le doute est inutile chez les bonnes soeurs.
C'est bien sûr le mot qui m'a séduite ce qui ne m'a pas empêchée d'avoir des convictions.
Balzac, ce fut le coup de foudre immédiat et je ne saurais dire pourquoi. J'y reviens régulièrement
quand aucun livre ne m'attire
quand j'ai du mal à sortir d'une lecture et à en commencer une nouvelle, je lis un Balzac.
Curieusement si je devais retenir un ouvrage en particulier, je ne choisirais pas le plus représentatif car ce serait
"La Peau de Chagrin"
un récit fantastique.
D'abord parce que j'aime les récits dans le récit.
Mais surtout à cause de sa problématique, posée au début, comme étant celle de l'existence : répondre à ses désirs et voir la vie se raccoucir ou s'interdire le désir et devenir vieux comme l'antiquaire.
Notre société ultra hygiéniste a d'ailleurs choisi pour nous : ne buvez pas, ne fumez pas, faites du sport, nourrissez-vous d'Oméga 3, à l'exclusion de tout ce qui fait plaisir, et vous vivrez lontemps.
Je n'en ai pas fini avec l'adolescence.
J'ai eu une période à la fois mystique mais anti-morale chrétienne.
Je vous assure, c'est compatible.
C'est en cette période que j'ai lu et relu, "L'Ensorcelée" de Barbey d'Aurevilly,
Encore un récit dans le récit.
L'abbé de La Croix-Jugan
le curé démoniaque
défiguré, enfoui sous son capuchon noir, parcourant à cheval la lande de Lessay, célébrant la messe au milieu des flammes (ou presque)
m'a profondément troublée
mais c'est une lecture que je ne pourrais reprendre aujourdhui.
D'ailleurs même à cette époque le le lisais en alternance avec
toujours pas incompatible pour moi.
Pourtant je n'ai jamais été maoïste, à la Fac je me suis même bagarrée avec eux.
Je ne le lirais pas davantage aujourd'hui même si le coming out des maoïstes de ma génération m'exaspère, ils ont gardé le même dogmatisme.
Bref, en 68, Barbey m'a protégée de Mao et aujourd'hui Mao m'empêche de devenir réac.
Je provoque un peu c'est vrai.
Le début de la maturité grâce à
Philip Roth et plus particulièrement
"Portnoy et son complexe".
Maintenant il me faut à mon tour faire des victimes...
Léopold ayant choisi des femmes je tague au masculin et des jeunes car j'ai envie de savoir ce qu'ils lisent.
mercredi, 19 novembre 2008 | Lien permanent | Commentaires (14)
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