vendredi, 16 mars 2007
Mémoires d'une dame de cour.
Le film de Zhang Yimou m'a donné envie de relire le seul témoignage existant sur la vie dans la Cité Interdite. Il a été recueilli par Jin Yi, étudiant en histoire à Pékin et la vieille dame qui lui a confié son histoire a été dame de cour sous la dernière dynastie mandchoue, celle des Qing, au service de l'impératrice Cixi.
Le terme dame de cour est un terme générique qui peut recouvrir plusieurs hiérarchies, des servantes subalternes jusqu'aux dames de cour supérieures. Celle dont on a collecté les mémoires, He Rong Er, appartenait aux rangs supérieurs. Entrée à la Cité Interdite à treize ans, elle fut mariée à dix-huit à un eunuque, en cadeau. Cette vie conjugale étant insupportable elle demanda à l'impératrice de revenir à la cour et obtint cette faveur exceptionnelle.
Dans ces Mémoires (éditées chez Picquier) elle retrace la vie au quotidien dans la Cité Interdite : plusieurs milliers de femmes y vivaient et autant d'eunuques.Elle relate toutes leurs occupations et obligations qui allaient jusqu'à imposer la position pour dormir.
"Il était interdit à une dame de cour de se coucher sur le dos, car elle était face au ciel. Elle devait se mettre sur le flanc et replier les jambes pour se mettre en boule."
Parmi les tâches qui lui furent confier, celle de servir à fumer à l'impératrice fut une des plus honorifiques car attribuée à des filles intelligentes et habiles.
Elle parle des nombreuses fêtes, divertissements, jeux mais aussi de toutes les manies de cette impératrice tyrannique.
C'était au début du XXème siècle et après la chute du régime impérial elle devint femme de ménage...
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jeudi, 15 mars 2007
La Cité Interdite
Je me suis précipitée à la sortie de ce nouveau film de Zhang Yimou. Il est magnifique...
J'adore ce cinéma chinois à la fois lyrique, épique et tragique... Les cinéastes comme Zhang Yimou (Epouses et concubines, Hero, Le secret des poignards volants) occupent, pour moi, sur la scène internationale la place qu'ont eu les grands Italiens comme Fellini, Visconti, Pasolini....
Il ne faut pas aller voir ce film pour trouver un documentaire sur la Cité interdite même si l'action se déroule sous la dynastie Tang (Xe siècle), l'une des plus prestigieuses de l'histoire chinoise.
A l'époque la capitale devait être X'iang et la reconstitution qu'en fait le cinéaste est tellement magnifiée (un peu holywoodisée quand même) qu'on n'assiste pas à une reconstitution historique.
On assiste à une tragédie antique dans un décor somptueux. C'est presque Racine, pour l'intrigue, d'autant que le film suit les règles des trois unités : unité de lieu, d'action et de temps, un jour, la veille de la fête des chrysanthèmes.Mais on est loin de l'austérité janséniste. Les armes volent ainsi que les hommes d'ailleurs et on retrouve le personnage féminin devenu classique de la spécialiste des arts martiaux. J'ai même cru repérer un clin d'oeil à "La guerre des Etoiles"...
On retrouve également la très belle et toujours aussi belle et même de plus en plus belle Gong Li vraiment impériale.
Si vous allez voir ce film vous ne considérerez plus votre pot de chrysanthème de Toussaint de la même manière !
10:40 Publié dans Âme chinoise | Lien permanent | Commentaires (10) | Facebook | Imprimer
mardi, 13 mars 2007
Mauvais garçon
Je me régale depuis hier du livre de Jean Teulé : "Je, François Villon".
Le voilà bien notre génie de l'adolescence ! Le mauvais garçon qui,pire que le "karcher", a connu la corde... On a fait quelques progrès, notez. Même si certains le regrettent.
Bien sûr la délinquance ne fait pas le poète pas plus que le chichon ne donne le génie...ai-je de nombreuses fois expliqué laborieusement à mes élèves...
Pour en revenir au livre de Teulé qui construit son histoire à partir des poèmes de Villon, il faut le lire...
Bien sûr ce n'est qu'un roman puisqu'on ne sait rien du poète voyou. Et il faut relire Villon malgré le (léger) obstacle du vieux français.
Au passage je remercie les blogueurs qui nous font goûter la poésie sous toutes ses formes : beaux textes et belles images.
Grâce à Internet c'est toute l'année le printemps des poètes...
10:15 Publié dans Coups de coeur | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook | Imprimer
lundi, 12 mars 2007
Lin Yutang
Amoureuse de la Chine depuis très longtemps, j'ai grand déplaisir à toujours entendre parler de cette nation soit pour s'extasier sur son taux de croissance soit pour critiquer son incapacité à respecter les Droits de l'Homme...
Pour moi la Chine c'est une grande, admirable et ancienne civilisation dans laquelle la philosophie, la littérature-en particulier la poésie- occupent la première place...
Ainsi j'ai envie de vous présenter Lin Yutang, écrivain presque contemporain (début du XXe siècle) qui permet de bien faire comprendre l'âme chinoise aux Occidentaux puiqu'il est le produit des deux cultures...
La Saga de Lin Yutang "Un moment à Pékin" (2 tomes édités chez Picquier) s'intéresse à cette période passionnante où la Chine bascule dans la modernité. Il balaie une page d'Histoire qui va de la révolte des Boxeurs- en fait déjà une révolte contre l'intrusion de la culture occidentale- en 1900 jusqu' au début de la seconde guerre mondiale.
C'est l'histoire de deux familles aisées, l'une taoïste et l'autre confucianiste, vues à travers les femmes... Deux d'entre elles se dégagent plus particulièrement pour incarner l'une l'attachement viscéral aux valeurs traditionnelles, l'autre l'ouverture aux idées nouvelles car ces deux familles sont également bouleversées par les événements du début du XXe siècle.
Ce qui plaît dans la lecture de cet ouvrage, c'est l'éclairage apporté par le roman sur les détails de l'organisation sociale, les rites et coutumes de la Chine traditionnelle. Tous les gestes de la vie quotidienne sont stictement codifiés, la place de chacun définie dans la hiérarchie familiale sans dérogation possible. On se régale tout particulièrement de la description des grandes cérémonies comme celles des mariages et des enterrements.
On comprend qu'en Chine tenir sa place est fondamental, et que "perdre la face" est ce qui peut arriver de pire à un Chinois, c'est pire que la mort...
D'où le tact dont nous devons faire preuve quand nous les rencontrons.
14:10 Publié dans Âme chinoise | Lien permanent | Commentaires (10) | Facebook | Imprimer
Rémi
En triant des papiers dimanche j'ai retrouvé ce poème de Rémi.
Il était dans ma classe il y a quelques années. En cours, il donnait l'impression de dormir. Ses camarades se moquaient de lui, gentiment car c'était une classe très sympa. Moi je voyais qu'il était tourné vers l'intérieur de lui-même comme s'il détenait quelque chose qu'il ne voulait pas laisser échapper...
C'était plutôt un bon élève, il a poursuivi sa scolarité mais les années suivantes mes collègues me disaient qu'il était souvent absent.
Il a réussi son Bac puis a continué en BTS...
Un jour il n'est plus venu.
A son enterrement, il y avait un grand chef indien en tenue traditionnelle. Un canadien francophone. Nous avons appris que la famille de Rémi lui avait offert la possibilité d'aller passer ses dernières semaines (il avait une leucémie) dans cette communauté indienne dont le "chef" se trouvait de passage à Lyon au moment de sa mort. Il lui a adressé un aurevoir dans sa langue.
Le poème écrit, un mois avant, dit bien ce qu'il a vécu, la sérénité et la préparation du départ.
J'aime particulièrement la chute qui reflète parfaitement ce qu'il était.
Si je rapporte ce souvenir, c'est surtout à l'intention des jeunes collègues qui "galèrent", car notre métier est d'une rare densité humaine et on ne se souvient après, que de ces élèves-là.
SI J'ETAIS UN OISEAU
Si demain je pouvais être un oiseau
Un grand aigle, noble, fier et beau
Je pourrais de quelque rocher
Du haut versant effilé
En un battement d'ailes majestueux
Prendre mon envol pour les cieux.
Avec mes ailes déployées
Je saurai apprécier
De chaque instant la beauté
Là, au milieu du ciel à planer
Le monde admirer
Le bruit du vent dans mes plumes écouter.
Je partirai en montagne pour visiter
Découvrir d'autres contrées
Et pour ma pause goûter
Je partirai en piquée
Pour quelque animal attraper
Dans mes serres acérées.
Et oui il faut se méfier
Quand on me voit tournoyer.
Mais je pourrais être moineau
Petit, fragile mais toujours un oiseau
Le plus important n'est pas la beauté,
De belles plumes, un bec effilé
C'est de sentir la liberté
Qu'ils ont a leur portée.
S'il y avait quelque dieu ou divinité
Qui pourrait mon souhait exaucer
J'en serais comblé.
Mais SVP soyez pas trop con
Me faites quand même pas pigeon !
12:15 Publié dans Souvenirs de prof | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook | Imprimer
Adolescence
"J'ai souvent pensé que l'être ne va peut-être jamais aussi loin qu'à l'adolescence, époque où il connaît de véritables moments de génie. Je n'aime pas ce mot et ne l'emploie jamais. Mais enfin il suggère assez bien, je crois, le caractère totalement stupéfiant de ces fulgurances qui semblent être comme en dehors de ce qui nous est habituellement dévolu."
Charles Juliet
Traversée de la nuit
Adolescence, espace de vie presque magique... L'adolescent sait et peut raisonner comme un adulte mais il a encore cette fragilité des bourgeons d'avril qu'un coup de gelée peut détruire. L'adolescent marche incertain sur la crête de l'avenir d'où il peut basculer, sur un versant comme sur l' autre.
Il est dans un monde où tout est possible.
C'est pourquoi j'ai tellement aimé les adolescents. Il m'est arrivé de retrouver, adultes, d'anciens élèves. Ils étaient (légitimement) fiers de me montrer ce qu'ils étaient devenus mais en les félicitant je ne pouvais m'empêcher de regretter les adolescents qu'ils avaient été. Là se trouve la différence entre les parents et le professeur.
Les parents sont heureux -à juste titre- de voir leurs enfants installés dans l'existence, établis, le professeur le plus souvent porte le deuil de l'adolescent qu'il a connu.
08:10 Publié dans Souvenirs de prof | Lien permanent | Commentaires (17) | Facebook | Imprimer
dimanche, 11 mars 2007
Dimanche
Dans mes souvenirs de dimanche il en est un auquel je suis très attachée...
Dans mon village natal, nous avions des cousins que nous visitions de temps en temps le dimanche après-midi, pas assez souvent à mon goût.
Une grande ferme, une grande cour et une grande cuisine...
Les gens y venaient le dimanche après-midi, comme ça sans être invités : la famille, les voisins, les amis...
Sur la table, qui occupait presque toute la pièce, des gâteaux et des tartes aux fruits quand c'était la saison. On s'asseyait autour, les hommes étaient en bras de chemise, les femmes papotaient...
Ma mère, qui n'était pas de la campagne, n'aimait pas trop mais mon père adorait.
Aujourd'hui, le dimanche, on nous propose d'aller pousser des caddies dans les supermarchés.
20:10 Publié dans D'une génération à l'autre | Lien permanent | Commentaires (10) | Facebook | Imprimer