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lundi, 18 juillet 2016

Mon père, vétérinaire rural

Numériser.jpegMon père était vétérinaire rural, il a exercé seul durant toute sa carrière. Pour sa génération il n'y avait pas encore d'associations et les premières cliniques vétérinaires commençaient à apparaître en ville.

Il s'est installé en 1943 dans le village de son enfance en Haute-Savoie. C'était encore un petit village. Il ne soignait pas les chiens et encore moins les chats. Quand un chien était trop vieux ou malade on l'achevait d'un coup de fusil. Mon père aimait énormément son travail surtout pour la relation avec les paysans qu'il conseillait pour l'élevage, l'agriculture et même l'éducation des enfants.

Pendant les vacances scolaires il nous emmenait dans ses tournées, ma soeur et moi.

Je me souviens plus particulièrement de l'hiver, de l'ambiance chaude de l'étable quand il gelait dehors. Les mamelles gonflées des vaches me fascinaient comme la dextérité des doigts de la fermière qui faisait gicler le lait car la traite se faisait encore à la main.

Mon père s'attardait toujours avant de prendre congé, buvant un café ou un verre de sirop de cassis l'été.

Une fois il lui est arrivé de sauver un nourrisson. Les paysans, préoccupés par l'état de leur vache, n'avaient pas vu que le bébé se déshydratait et risquait la mort. Mon père les avait alertés et conduits chez le médecin. Mais  il y avait des visites que je redoutais, c'était celles à l'abattoir où il contrôlait la viande. C'était froid, nu et ça sentait le sang. Une fois j'avais failli vomir à la vue de viscères accumulés dans un coin à même le sol. J'étais partie en courant et mon père m'avait traitée de petite nature. En revanche je n'ai jamais assisté à des castrations de taureaux, c'était réservé à mes frères.

Parlons-en de la castration des animaux.

Dans une lettre qu'il a adressé à ma mère, j'ai lu que mon père se présentait comme "hongreur". Le mot est inexact puisque le hongreur ne castre que les chevaux, les ânes et les mulets. Le cheval hogre, à qui on a enlevé les testicules, doit son nom aux chevaux de steppe en Hongrie. Les Arabes en revanche, superbes cavaliers, ne castraient pas les chevaux, très fiers de monter des chevaux entiers. C'est plus viril.

Mon père castrait donc régulièrement des animaux d'espèces diverses : les porcs, pour les engraisser, les chats et même rarement les chiens, mais aussi les chevaux et les taureaux.

Ce sont ces gros mammifères qui occasionnaient les opérations les plus redoutables car elles étaient pratiquées sans anesthésie.

Deux de mes frères Michel et Philippe ont récemment confronté  les souvenirs qu'ils conservaient de ces castrations.

Pour les taureaux, aucun doute puisque Michel a filmé une opération. Six hommes forts maintiennent un jeune taureau pourtant entravé.Le vétérinaire découpe les testicules qu'il enlève et suture la plaie. Ce jour-là, ma mère les avait cuisiné au déjeuner de midi. Inutile de préciser que mon père avait été le seul à s'en régaler.

Mais pour les chevaux, mes frères n'étaient pas d'accord sur la méthode. Philippe avait vu notre père bloquer les testicules d'un cheval avec des casseaux -cylindres de bois fabriqués à cet usage- et les entortiller avec une cordelette : le sang n'arrivant plus, les organes sèchent et finissent par tomber d'eux-mêmes. Michel au contraire avait vu une castration faite par incision comme pour les taureaux. En fait les deux méthodes existent.

Aujourd'hui, les castrations se font la plupart du temps sous anesthésie général.

Mon père travaillait tout le temps, il faisait des visites même le dimanche sauf à l'heure de la messe qui était sacrée, autant pour lui que pour ses clients. Il ne prenait jamais de vacances. L'été il avait un peu de temps libre l'après-midi quand les paysans étaient dans leurs champs. Le travail arrivait le soir, à l'heure de traire on découvrait qu'une vache n'allait pas bien ou se préparait à véler difficilement. Mais l'après-midi nous allions nous baigner au lac puisque nous habitions  près du lac Léman.

C'est ma mère qui tenait comptes et registres et passaient les commandes pour les médicaments. Car le vétérinaire est aussi pharmacien. Ma mère vendait les médicaments les plus courants que les clients connaissaient et réclamaient comme celui pour la mammite, cette infection de la mamelle -on disait les trayons- fréquente chez les vaches laitières. Les clients venaient à la maison, dans le bureau, pièce qui bénéficiait d'une entrée indépendante. Mais pas question pour ma mère de tenir un chien si d'aventure une estivante venait faire soigner le sien. Elle avait peur des animaux et les exécrait, mon père devait se débrouiller seul.

Le plus difficile pour lui c'était quand même les vélages de nuit. Mon père était un gros dormeur et quand il devait partir dans la nuit d'hiver véler une vache en montagne, quelle épreuve...la sonnerie du téléphone ou de la porte me réveillait et je l'entendais râler , ma mère l'accompagnant de paroles apaisantes.

Le vétérinaire était à cette époque un personnage important comme l'instituteur et le curé. De lui dépendait la subsistance d'une famille. Perdre une vache bonne laitière et en capacité de se reproduire pouvait entraîner la pauvreté.

 

 

vendredi, 15 juillet 2016

Fatiguée

J'avais préparé pour ce week-end une note sur mes lectures d'été. Mais hier soir, au retour du feu d'artifice lyonnais, l'horreur m'a à nouveau assommée comme elle a bouleversé tous les Français. 

Nous sommes sidérés, abasourdis, anesthésiés mais surtout fatigués par cette déferlante de haine.

Fatigués de pleurer, de nous émouvoir.

Fatigués de ces émotions inutiles en pensant et maintenant "à qui le tour, ça ne finira jamais." 

Fatigués d'en parler, d'analyser, de chercher à comprendre.

Éprouvés et sans voix.

donc je n'ai plus  la tête à mes lectures.

finalement je me suis réfugiée dans le dérisoire et j'ai fait de la confiture.

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mercredi, 22 juin 2016

Passage

Peut-on encore s'appeler "Passage" quand on n'y passe plus... A moins qu'une horloge cachée m'ait prescrit pour ce blogue, un rythme mensuel.

Inspirée par le soleil d'été enfin présent ? Pas sûre. Cela inciterait plutôt à sortir. Le manque ? Pas vraiment non plus.

Je suis plutôt bonne dormeuse mais en cas d'insomnie j'écris sur ce blogue. Je devrais me lever mais j'ai des insomnies plutôt brèves et  beaucoup de peine à quitter le lit. Donc le matin, soit j'ai oublié soit je trouve que c'est nul.

Mon ami Pierre Autin Grenier le poète s'astreignait à écrire tous les jours. Mais il faut croire que ce n'est pas ma vocation.

Ma vocation ce serait plutôt de déménager chaque jour une sorte de bric-à-brac que les temps, les autres ou je ne sais qui déposent à ma porte.

Mon incapacité à dire non : quelle tare.

Avec la venue de l'été un peu de temps disponible s'installe.

Un peu de temps pour moi, un peu de temps pour vous : enfin j'espère.

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La Ferme du Pecheur

 

mardi, 24 mai 2016

Hier et aujourd'hui

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J'ai renouvelé mon abonnement à Hautetfort.

Chaque année la même impression d'un engagement, de signer un pacte.

Et pourtant je mesure que c'est plus difficile qu'hier.

La vie quotidienne prend le dessus, dévore ce modeste jardin de ses lianes et de ses herbes folles, étouffant les mots et l'écriture.

Il y a toujours urgence pour quelque chose ou quelqu'un.

Je m'agite trop sans doute.

Mais quand je me poserai, ne sera-t-il pas trop tard ?

lundi, 23 mai 2016

Quand est-ce qu'on s'y met ?

Pour Organza...

Quand je serai vieille, je m’habillerai de mauve
Je mettrai un chapeau rouge qui jure avec ma robe
Je dépenserai ma pension en cognac et en gants de dentelle
En sandales de satin et je dirai que
Nous n’avons pas les moyens d’acheter du beurre

Je m’assoirai sur le trottoir quand je serai fatiguée
Je tirerai les sonnettes d’alarme
Je ferai courir ma canne sur les barreaux des clôtures
Je rattraperai le temps perdu quand j’étais jeune et sérieuse

Je sortirai en pantoufles sous la pluie
Je cueillerai des fleurs dans les jardins des autres
J’apprendrai à cracher très loin
Mais peut-être devrais-je m’exercer un peu avant
Afin que mes amis ne soient pas surpris et choqués
Quand tout à coup je serai vieille
Et que je m’habillerai de mauve

Rose in the afternoon, Jenny Joseph, 1963

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jeudi, 28 avril 2016

Qu'est-ce que la vie ?

Vu par Pierre-Autin Grenier

 

"Bonnes manières : quand tu baises

tu lèves la queue, quand tu bois

tu peux lever le coude."

"Les chemins de la gloire

sont balisés de crottes de chien."

 

"Assez sédentaire, je ne voyage

vraiment qu'au "Café des voyageurs."

 

"Tricycle ! Mobylette ! Mercédès !

Corbillard !

Amen".

 

"Très tôt j'ai compris que j'étais

comme les cerises

et que je me conserverais mieux et plus longtemps

dans l'eau de vie."

 

Pierre Autin-Grenier

"Le poète pisse dans son violon".

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mardi, 26 avril 2016

Le poète pisse dans son violon (suite)

Littérature et poésie

 

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"Littérature contemporaine : "Ici on apporte

 son manger."

 

"Le veau est une viande qui se laisse

trop facilement influencer par les sauces,

certains écrivains de même."

 

"Tout poète se trouve

quotidiennement confronté à

l'urgence de l'inutile."

 

"Se promener nu dans la  littérature

est un plaisir sauvage."

 

 Pierre Autin-Grenier

"Le poète pisse dans son violon"