mercredi, 06 janvier 2016
Quand le monde s'illumine
Hier. matin, 9 heures, sur le quai du tramway.
Le tram arrive, la porte s'ouvre. Un jeune homme devant moi, mieux placé pour monter le premier, s'efface et me fait signe d'entrer avec un grand sourire.
Ce jeune homme ne le sait pas mais son geste devenu rare, et donc précieux, a illuminé le début de ma journée.
Scène suivante. La réunion de début d'année de mon association de grands-parents. Parmi nos nombreuses activités nous avons la distribution de tricots confectionnés avec goût, amour , passion par des grands-mères que nous distribuons dans les maternités ou aux restos du cœur. Ce matin nous découvrons la très belle lettre de la responsable d'un des centres pour bébés mais aussi les remerciements des mamans bénéficiaires. Certains mots sont écrits quasiment en phonétique mais ils nous réjouissent profondément.
Je pourrais ainsi continuer ma journée.
Notre vie quotidienne est remplie de belles personnes comme on dit aujourd'hui, de gens positifs, d'actions utiles et généreuses.
Je ne pense pas vivre dans un cocon, c'est une question de regard.
Cet été j'ai eu l'occasion d'écouter le témoignage d'un journaliste écrivant dans notre quotidien local : Le Progrès.
Il avait fait pour nous un très intéressant retour sur sa carrière. Débutant dans un journal de la presse nationale, il avait été envoyé sur un terrain de guerre, en Irak je crois. Il était rentré traumatisé par ce dont il avait dû rendre compte dans ses articles.
Au point d'en faire une dépression. Raison pour laquelle il avait choisi de travailler au Progrès. Ses articles concernent la vie quotidienne, loin certes des grands débats et des grandes idées qu'on peut se toute façon trouver ailleurs.
Mais des articles qui changent le regard.
Comme il l'avait souligné dans son témoignage, nous sommes finalement davantage entourés de gens positifs et génèreux que de salauds.
Changer de regard n'est pas être dans le déni de ce qui va mal, mais pour ce qui va mal on ne manque pas de moyens d'en être informés.
Mais des actes justes, bons ou tout simplement attentionnés, qui s'en charge ?
10:13 Publié dans Au jour le jour, Entendu dans la rue..., Passages vers... | Lien permanent | Commentaires (5) | Facebook | Imprimer
mardi, 22 décembre 2015
Son visage et le tien
Pour Doume qui semble en plein doute...
J'ai eu l'occasion de critiquer assez sévèrement le premier roman d'Alexis Jenni "L'art français de la guerre" qui lui avait valu le prix Goncourt. En revanche j'ai été assez impressionnée par son petit livre de spiritualité "Son visage et le tien".
L'écrivain parle de sa découverte de la foi.
Cela commence dans l’ignorance, le non-dit. Dieu se glisse dans le silence d’un grand-père croyant mais taiseux. Une foi présente et distante, pesante selon l’auteur qui n’a pas reçu d’enseignement religieux hormis ce temps où sa mère lui a lu la Bible comme on lit de belles histoires. Pourtant à travers le vide et l’absence de Dieu, dont ses parents souhaitent même le tenir éloigné, Alexis Jenni va entrevoir la Lumière, percevoir le Souffle, accueillir la vitalité.
Ainsi en est-il de la foi pour Alexis Jenni. Ce n’est pas produit d’un enseignement mais une source, cachée, que l’on peut retrouver grâce à l’expérience de nos sens, à la découverte des sensations de notre corps porteuses de vérité.
« L’acte de croire est une confiance, un état de disponibilité, une sensibilité extrême de tous les sens, celui qui sent l’ensemble des sens, et que l’on pourrait appeler sens de la présence.
La foi dans sa conscience est une sensibilité. »
Croire, c’est retrouver le bon usage de ses sens et de ces sensations dont on nous a appris à nous méfier. Mais il faut éviter les pièges car nos sensations peuvent être polluées par des perceptions conditionnées dont nous attendons l’accès immédiat et facile à la réalité sans que cela nous conduise à Dieu. Mieux vaut par exemple écouter le silence qu’une musique qui remplit du vide. Les sensations nous permettent d’accéder à Dieu quand elles sont en prise avec l’intelligence, la pensée et surtout l’imagination. Voir, c’est voir ce que notre œil ne perçoit pas, voir l’invisible.
« On peut ne pas voir ce qui est, on peut tout autant voir ce qui n’est pas, car c’est la pensée qui voit, pas l’œil ; et le monde dans lequel nous vivons nous paraît toujours plein, toujours exact, toujours évidente, pauvres grands singes forestiers que nous sommes. »
Le goût, l’odorat, ces sens primitifs nous donnent accès au passé, aux souvenirs, à notre intimité profonde, à l’essentiel.
En revanche le goût, ce sens dont on pourrait penser qu’il nous éloigne de l’intelligence tant il paraît primitif est peut-être celui qui nous introduit le mieux à la connaissance de Dieu.
« Ce dont on a le goût est somme toute assez simple, mais on n’en fait jamais le tour, on ne le saisit jamais, et du coup jamais on ne s’en lasse ; c’est bien la vertu de ce sens là, si fruste et si profond, incapable de subtilité, incapable d’aucune précision, mais qui nous lance dans une énergie obstinée sur une voie qui du coup est la nôtre. On ne sait pas où cela va, mais c’est c’est la nôtre ; voilà le goût : simple, personnel et sans fin. »
C’est en ouvrant nos sens à ce qui est leur fonction primordiale, soit permettre à l’humain d’être traversé par le souffle de la vie, le Souffle de la Résurrection, que nous pouvons créer un espace pour accueillir Dieu. Dieu ne peut entrer dans une maison encombrée, vivre dans un bric-à-brac de sensations perverties par des injonctions sociétales.
« le vrai cauchemar est le plein, un monde totalement rempli au point qu’il n’y reste ni terrain vague ni temps mort, plus d’ennui. Seul le vide laisse place, et permet la vie. »
Alexis Jenni nous engage ainsi à nous méfier de ce qu’il appelle notre sens préféré : voir. Voir, omni présent dans notre société est dominé par l’abus de l’image qui donne l’illusion d’accéder à la réalité, fait de nous des tout-puissants et nous détourne de l’essentiel.
Au contraire « Sentir, toucher, entendre, goûter sont des sens qui sont sans distance. Ce que l’on perçoit, on est dedans, cela vient d’où ça veut, on y est, c’est là ; et quand on y échappe pas, car il n’est pas de paupières aux mains, au nez, à la langue ou aux oreilles. En ces sens-là, que l’on éprouve en silence et les yeux clos, loge l’amour, et c’est là qu’il se déploie. »
Le fin mot de cette histoire, c’est l’amour, c’est à l’amour que nos sens nous destinent, c’est vers l’amour que nos sens nous orientent.
Pour Alexis Jenni tout parcours spirituel passe par l'attention qu'on accorde à ses sens, c'est ce qui fait la très grande originalité de ce livre.
07:24 Publié dans Coups de coeur, Passages vers... | Lien permanent | Commentaires (6) | Facebook | Imprimer
dimanche, 20 décembre 2015
J'ouvre les fenêtres
Quand je reviens sur ce blogue j'ai l'impression de retrouver une maison qui est restée fermée pendant longtemps. Ça sent le moisi et le renfermé. Il y a des toiles d'araignée et beaucoup de poussière. Il faudrait que je fasse le ménage. D'abord ouvrir les fenêtres. Et par où commencer ?
Il y a aussi tous les fantômes qui m'attendent dans ces murs, les blogueurs disparus... Yves, PAG, Alsa..
L'absence est remplie d'un bric-à-brac de tout se qui se passe dans la vie réelle. Mais aussi bric-à-brac d'objets connectés qui encombrent, les autres médias, les réseaux sociaux. C'est plus facile, en apparence.
Le blogue c'est compliqué.
Quand on en a perdu le chemin on se demande : que dire ? Les amis visiteurs sont-ils encore là ou partis ailleurs ? Sans le message d'une visiteuse attentive et bienveillante je ne serais sans doute pas en train d'écrire.
Il faut retrouver la bonne distance entre l'intime et le public.
L'intime, cela n'intéresse sans doute personne.
Pour l'actualité, je manque de compétence et ne suis pas légitime.
Mais c'est bientôt l'anniversaire de ce blogue. Je ne vais pas abandonner la maison, faire un peu de ménage. Remettre les choses en place. Et peut-être séjourner un peu.
Merci Natacha.
09:57 Publié dans Passages vers... | Lien permanent | Commentaires (9) | Facebook | Imprimer
jeudi, 02 juillet 2015
Amitié virtuelle, amitié éternelle...
Alsacop devenu Alsa, un de mes premiers amis de la blogosphère est parti.
Au-delà des nuages, des blogues, de sa famille.
Vraiment parti.
Il s'appelait Mario dans la vraie vie.
Je l'ai connu ainsi que Doume, mes deux amis alsaciens, fin 2006.
Je savais qu'il était lourdement handicapé, en fauteuil roulant à l'extérieur, avec deux béquilles dans sa maison.
La blogosphère heureusement est un territoire où le fauteuil est inutile. Avec Yves, Noelle, Doume, Alsa nous avions, initiée par Yves, suivi une Transate virtuelle sur un bateau que nous avions baptisé l'Utopie. Yves aussi soignait un cancer et il est parti lui aussi.
Des décennies de souffrance et de lutte. Un magnifique combattant Mario.
Des heures de travail sur son corps, au quotidien, pour rester tonique. Et il l'était parfaitement tonique. Plus tonique dans son fauteuil que certains valides sur leurs deux jambes.
Je peux l'écrire car je l'ai rencontré chez lui il y a juste un an. Avec Roso nous avions eu l'opportunité d'un séjour en Alsace en juin 2014.
Alsa et Doume nous avaient accueillis, ainsi que leurs épouses, de façon splendide et chaleureuse. Nous avions fêté leurs deux anniversaires car tous deux sont né en juin.
Cette année Mario est parti en soins palliatifs juste après ce nouvel anniversaire.
Son dernier séjour à l'hôpital.
J'avais publié le très beau texte qu'il avait écrit sur une journée à l'hôpital car il en avait connu beaucoup.
Adieu donc Alsa, Adieu Mario : ami virtuel et ami réel.
Quel réconfort de t'avoir rencontré l'an dernier.
Amitié virtuelle, amitié réelle dont il me restera une image charnelle.
Photo prise et envoyée par Doume
09:26 Publié dans Au jour le jour, D'une génération à l'autre, Passages vers... | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook | Imprimer
mercredi, 19 novembre 2014
Sur le départ...
Me voici sur le départ pour un nouveau voyage. Trois semaines en Ethiopie… Dans des conditions pas toujours très faciles mais j'avais tellement envie de connaître ce pays que je devrais résister !
Deux jours de randonnée avec bivouac
mais ce qui m'inquiète le plus c'est une marche de nuit pour atteindre un volcan l'erta ale.
On est obligé de marcher de nuit car il fait tellement chaud dans cette région située en-dessous du niveau de la mer,
la température est à 40 ° dans la journée.
Moi je serais bien partie seulement pour l'Abyssine et la partie historique
des églises et des débuts du christianisme
(second pays christianisé du monde)
mais Roso et ses amis trekkeurs
en ont décidé autrement.
Doume et Alsa
qui me connaissent un peu mieux
et savent que je n'ai rien d'une baroudeuse
vont bien rire.
L'erta Ale
C'est aussi un volcan
mais qui dégage des vapeurs tellement toxiques
que nous devrons porter un masque.
J'espère quand même revenir en assez bon état pour vous raconter car je ne pars pas vraiment sereine. Je ne verrai pas Lucy, très protégée. Retour prévu le 12 décembre !
C'est le pays de nos ancêtres à tous...
10:45 Publié dans Au jour le jour, Passages vers... | Lien permanent | Commentaires (12) | Facebook | Imprimer
dimanche, 16 novembre 2014
Mademoiselle Léonie
On l'appelait mademoiselle Léonie.
Discrète, silencieuse : pas grand chose à dire d'elle et pourtant je me souviens.
Quand j'étais enfant, dans les années 50, elle passait dans les maisons pour coudre, raccommoder, faire du neuf avec du vieux, remettre les vêtements des enfants à la bonne taille...
Elle restait environ une semaine, au printemps et en automne, mangeait à notre table, toujours sans parler.
C' est surtout le témoin d'une époque qui paraît si lointaine, complètement révolue,
celle où on achetait peu de vêtements, on faisait durer, on se transmettait les habits entre frères est entre soeurs. En tant qu'aînée, j'étais de ce point de vue chanceuse.
On ne changeait pas de vêtements souvent, on les usait.
Tout ça a basculé dans les années 60, l'ère de la consommation.
18:41 Publié dans D'une génération à l'autre, Passages vers... | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook | Imprimer
jeudi, 11 septembre 2014
Septembre 1914
11 septembre 1914
Ma chère Marie
J'ai recu avant hier ta lettre du 18 et tes deux cartes du 22 et 27 août.
Inutile de te dire le plaisir qu'elles m'ont causé. Nous sommes actuellement à 30 Km de Paris.
Je vais toujours bien, je passe entre les obus, espérons que la chance durera. Je n'ai besoin de rien. l'oncle Marie a-t-il été chercher le bois ? Dis le moi il faut l'amener si les chemins sont encore bons. A-t-il toujours son cheval ?
As-tu des nouvelles de Louis et de Léon ? Jeanne en a-t-elle de son fiancé ?
Que disent les docteurs du village de la guerre ?
Tous ça m'intéresse, mais tu ne m'en dis jamais un mot.
Et toi comment vas-tu ? ne te force pas trop au travail ma chérie. Que je te trouve toujours fraîche et jolie quand je reviendrai.
Mais je crois qu'il y en a pour un moment avant que se signe la paix car ça ne vas pas vite. C'est aussi bien triste quand on voit des villages entiers brulés, des routes pleines de gens qui fuient. D'autres qui rentré chez eux ne retrouvent que des ruines fumantes.
Estimons nous encore heureux que la guerre ne soit pas portée chez nous.
Ca n'est pas rose non plus pour l'allemand, les soldats que j'ai vu prisonniers ramassaient du pain moisi dans la boue et le dévoraient. Nous nous touchons bien nos vivre.
Vite une lettre ma petite, ton petit Zouaves qui t'embrasse bien bien bien fort.
H.Mermin
Chères soeurs
Comment prenez vous l'affaire ! vous ne passez des vacances comme vous en escomptiez. Vous avez bien raison de ne pas vous faire de bile, ça ne sert a rien. Je dis cela surtout pour Jeanne a moins que ses pleurs aient cessé. Quant a moi j'y prend le mieux du monde ne pouvant faire autrement jusqu'a présent pas de balles, rien que des obus, on se met a plat ventre quand on les entend venir après on rigole.
Je vous embrasse toutes les trois en attendant de se redisputer avec vous. Votre frangin
H.M.
(écrit sur la même feuille de papier)
08:35 Publié dans Mon centenaire 1914/2014, Passages vers... | Lien permanent | Commentaires (7) | Facebook | Imprimer