mercredi, 08 août 2007
Anne a lu Wang Anyi
Anne, l'artiste, a lu pendant ses vacances, le roman de Wang Anyi, "Chant des regrets éternels".
Comme elle n'a pu rentrer de commentaire correspondant à la note où j'avais présenté ce livre, je vous fais part de ses impressions qu'elle m'a transmises par courriel.
"J'AI ADORE !
Je l'ai lu en 5 jours. Impossible, enfin très difficile, de se détacher de la vie de l'héroine et des personnages qui papillonnent autour d'elle.
Poésie, délicatesse, détermination, harmonie, douleur aussi... le texte et l'histoire s'épousent dans un éblouissement chatoyant comme la soie des tissus omniprésents.
Je pourrais parler des heures de ce livre sans parvenir pourtant à en extraire la beauté ; j'ai le sentiment d'avoir traversé un livre de lumière et de couleurs où le destin des personnages s'entrecroisent sans heurts apparents, dans une harmonie que même les évènements historiques , que l'on devine au gré d'allusions ponctuelles, ne peuvent troubler."
Anne est encore plus enthousiaste que moi.
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mercredi, 04 juillet 2007
Lao She
A lire pendant ces vacances, l'une de mes passions chinoises.
J'ai découvert à l'occasion de mes dernières lectures dont je reparlerai, les horreurs du massacre de Nankin : plus que jamais lire Lao She sur la guerre sino-japonaise (qu'on devrait d'ailleurs appeler nippo-chinoise ! ).
Lao She est un contemporain de Lin Yutang mais les deux écrivains n'étaient dans le même camp. Lin Yutang s'est retrouvé en exil pour avoir soutenu Chiang Kai Shek alors que Lao She a soutenu le régime communiste et a été "suicidé" pendant la Révolution culturelle.
La lecture de Lao She est également très précieuse pour comprendre la Chine d'aujourd'hui.
Toute son oeuvre est intéressante mais pour faire pendant à la saga de Lin Yutang j'ai choisi "Quatre Générations sous le même toit". (Tois tomes, collection Folio)
Dans ce roman Lao She limite son action à l'occupation de Pékin par les Japonais. (1937) L'histoire se passe dans un "hutong" de Pékin, la ruelle du Petit Bercail, où se côtoient commerçants, lettrés, conducteurs de pousse...
Le titre seul "Quatre Générations sous le même toit " évoque toute la philosohie de la famille chinoise : c'est aussi le rêve du vieux Qi, l'aïeul de la famille, au centre du roman. Son rêve est pourtant mis à mal par des événements terribles et la persécution des japonais. On retrouve dans la ruelle qui vit en vase clos, tous les comportements d'une période d'occupation : il y a les collabos (odieux à souhait), les résistants (forcément héroïques), et ceux qui, comme le famille Qi, essaient de vivre en protégeant l'harmonie familiale dans la dignité et sans compromissions. Vue par Lao She, l'occupation japonaise paraît encore pire que celle que la France a subie des Allemands car si les tortures infligées aux Chinois n'avaient rien à envier à celles de la gestapo, il s'ajoutait une volonté d'humiliation qui, dans le roman, pousse plusieurs personnages au suicide.
Ce roman est passionnant à plus d'un titre. Le temps de l'action est le temps réel, l'histoire s'écoule lentement, écrite selon les différents points de vue des personnages. Ce qui est délectable chez Lao She c'est qu'il n'est pas prisonnier d'un registre : on passe sans transition de Balzac à Pagnol. Observation réaliste des comportements humains mais aussi humour, dérision, satire sans oublier la poésie qui affleure toujours dans les romans chinois. Enfin Lao She pose des questions fondamentales.
La culture chinoise traditionnelle n'a-t-elle pas fragilisé la nation au point qu'elle n'a pu résister à l'envahisseur japonais ?
Jusqu'où peut-on aller pour protéger sa famille ?
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dimanche, 24 juin 2007
Tan Dun
L'Auditorium de Lyon a terminé la saison par une soirée consacrée à Tan Dun.
Je ne le connaissais pas, mais toujours curieuse des artistes chinois, j'ai eu envie de découvrir le créateur de la musique de "Tigre et Dragon" de Ang Lee. Un de mes films préférés...
Je ne suis ni mélomane ni musicologue : c'est donc en toute naïveté que j'ai été émerveillée par ce compositeur aussi atypique. Il nous a présenté son oeuvre avant de diriger l'orchestre symphonique de Lyon pour l'interprétation de "Paper concerto" et de "Water concerto".
Il nous a ainsi invités à entrer dans son univers musical, très particulier. Né dans le Hunan, région de Chine où la nature est préservée, Tan Dun est en recherche permanente des sons de son enfance. Dans ses deux concertos, les solistes sont les percusionnistes qui utilisent comme instruments le papier et l'eau.
Le papier sous toutes ses formes : depuis la petite feuille de papier de soie délicatement froissée ou déchirée jusqu'aux immenses panneaux suspendus sur lesquels les percusionnistes se déchaînent comme sur une batterie.
Pour l'eau, des vasques où l'interprète peut tantôt jouer avec l'eau entre les mains ou la frapper avec des gobelets renversés ou autres improvisations.... D'ailleurs Tan Dun nous a dit avoir été très influencé par la musique de Debussy.
Ces deux concertos nous ont réellement entraînés dans des promenades en forêt qui n'étaient pas sans rappeler la superbe scène dans la forêt de bambous de "Tigre et Dragon". Film qui nous a été projeté après le concert et que j'ai revu avec un plaisir infini.
Un compositeur contemporain à découvrir et si vous revoyez "Tigre et Dragon" ou "Hero" soyez attentifs à la
bande sonore.
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mercredi, 13 juin 2007
Parabole taoïste
Un vieillard vivait avec son fils dans un fort abandonné, au sommet d'une colline, et un jour il perdit un cheval. Les voisins vinrent lui exprimer leur sympathie pour ce malheur et le vieillard demanda :
"Comment savez-vous que c'est un malheur ?"
Quelques jours plus tard, le cheval revint, suivi de plusieurs chevaux sauvages, les voisins revinrent le féliciter de cette chance et le vieillard répliqua :
"Comment savez-vous que c'est une chance ?"
Entouré de tant de chevaux, le fils se mit à les monter et un jour se cassa la jambe. De nouveau les voisins s'approchèrent pour exprimer leur sympathie et le vieillard répondit :
"Comment savez-vous que c'est une malchance ?"
L'année suivante il y eut une guerre et, parce que le fils du vieillard était boiteux, il évita d'aller au front.
Attribué au philosophe taoïste Liezi ( 450/375 avant J.-C.) et cité par Lin Yutang dans "L'importance de vivre"
Chacun interprétera selon son humeur : Sagesse ou fatalisme ?
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dimanche, 27 mai 2007
Shanghai
"Le Chant des regrets éternels", le roman de Wang Anyi, est à travers le destin de son héroïne, une métaphore de la mutation de Shanghai.
"Shanghai est omniprésente, fissure du monde où l'on peut se cacher loin des tourments de l'histoire qui traverse le siècle." est-il écrit dans la préface. Une ville qui ne sera plus ce qu'elle a été...Un roman qui décrit le temps suspendu...
"Toutes les lumières de ces points et ces lignes ressortent sur les ombres de Shanghai depuis plusieurs dizaines d'années. L'éclat de ce Paris de l'Orient se déploie lui aussi sur ce fond d'ombres ..."
Wang Anyi
Deux vues de la rue de Nankin, avenue très fréquentée et considérée comme chic...
Les anciennes ruelles aujourd'hui coincées entre les tours...
"Dans chaque travée de ces ruelles s'agitent des choses imprévisibles et pourtant raisonnables, non pas de grands événements mais des petits riens qui, mis ensemble, forment un tout"
Wang Anyi
Shangai a conservé une partie de sa ville ancienne en architecture traditionnelle et régulièrement rénovée...
Voici la plus ancienne maison de thé.
Immeubles des années 70
Le très beau musée de Shanghai...
Shanghai, ce n'est pas la Chine mais un monde à part, toujours mythique.
Pour Adeline qui me l'a demandé.
"Les ruelles de Shanghai sont sensuelles, intimes comme le contact de la peau ; fraîches et tièdes au toucher, on peut les appréhender mais elles gardent leur part de secret. Les fenêtres graisseuses des cuisines, à l'arrière des maisons, permettent aux servantes de bavarder, l'une dedans, l'autre dehors ; les portes de derrière livrent passage aux jeunes demoiselles qui vont au lycée sac de classe à la main, ou à des rendez-vous galants ; les grandes portes ne sont ouvertes que pour les événements importants, pour accueillir des invités de marque, quand on y colle des faire-part de mariage ou de décès. Toujours plus ou moins en effervescence, les ruelles sont agitées et bavardes. Les terrasses et les balcons, comme les rebords des fenêtres, retiennent les confidences ; la nuit, les coups frappés aux portes se succèdent ici et là."
Le Chant des regrets éternels
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jeudi, 24 mai 2007
Le chant des regrets éternels
Il y a longtemps que je n'avais pas parlé de littérature chinoise. Je viens de terminer le roman de Wang Anyi,
"Le Chant des regrets éternels".
L'auteur, née en 1954, est la fille de deux écrivains chinois qui ont eu à souffrir de la révolution culturelle. Ce roman n'en porte pourtant aucune trace.
Il faut dire que Wang Anyi est shanghaienne et je dirais même plus shanghaienne que chinoise. Le roman est d'abord un hymne à Shanghai.
En tant que romancière, Wang Anyi se réclame de Balzac. Elle en a retenu la nécessité de décrire, essentiellement pour planter le décor. Rien à voir pourtant avec les quelque cinquante pages de présentation de la pension Vauquer dans "Le Père Goriot". Ici les premiers chapitres sont consacrés à une visite de Shanghai. La ville mythique des années 40, la ville du cinéma et de l'occidentalisation à outrance sur laquelle flotte un air de belle époque.
Promenade superbe dans Shanghai , ville de ruelles animées, les "lontangs", où, curieusement, les jeunes filles mènent leur vie dans une liberté étonnante.
Débute ensuite l'histoire d'une héroïne qui sera à la fois produit et victime de cette ville. Ts'iyao, prise dans une toile d'araignée, éblouie par la mode, l'apparence, le succès, la beauté... Plutôt qu'au rêve de célébrité c'est au piège de la richesse que sera le rendez-vous.
Elle devient ce qu'on appelle en France une "demi-mondaine".
Les Chinois ont un vocable plus poétique et parlent de "fleur de la société".
"Ces fleurs se situaient à mi-chemin entre honnête femme et prostituée, entre première épouse et concubine."
Toutefois Ts'iyao n'est pas Nana : instruite, intelligente, lucide elle saura faire face à l'adversité et se protéger en se glissant dans une niche, encore une ruelle, pendant les années maoistes auxquelles elle échappe, peu évoquées d'ailleurs par la narratrice, attachée exclusivement au destin individuel de son personnage. Sa passion des vêtements, fil conducteur du récit, devient une vertu, sa manière de se réaliser.
L'histoire se termine dans les années 80. Shanghai n'est pas encore la mégapole actuelle. Les jeunes, nostalgiques, essaient de restaurer modes et art de vivre des années fastes.
Pour Ts' iyao c'est l'occasion de revenir en pleine lumière : trop tard.
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mardi, 24 avril 2007
Contemplation
Dans le train que vous avez eu sous les yeux nous avons passé douze heures. Douze heures pendant lesquelles le paysage n'a pas plus changé que celui montré par ces quelques photos. A peine quelques troupeaux de yacks pour l'animer...Il faut aimer les déserts et la contemplation. Certains ont trouvé ces heures insupportables car la contemplation peut être ennui...
La contemplation n'est pas l'ennemie de l'action au contraire elle la régénère.
Les agités ne sont pas toujours les plus efficaces.
S'en souvenir en cette période d'élections.
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