dimanche, 15 février 2009
Saint-Valentin, l'After
à Pierre Autin-Grenier
- J'ai vu un papillon jaune et vert, dit-elle, avec de petits yeux sur les ailes.
-Eh bien ?
-je ne sais pas. Tout à coup, je me suis sentie très triste.
- C'était un papillon mort ?
- Non, vivant, mais c'était comme si moi j'étais déjà morte.
- Symboliquement, les papillons sont liés à la mort. Est-ce cela que tu veux dire ?
- Non. Je ne connais rien à ces choses dont tu parles si souvent sans que je puisse vraiment les comprendre, mais de toute façon ce n'est pas de cela qu'il s'agissait.
- Il s'agissait d'un papillon jaune et vert, avec de petits yeux sur les ailes.
- Pas seulement.
- De quoi, alors ?
- Du papillon, mais aussi de tout ce qui meurt autour de nous. De tout ce qui meurt et de tout ce qui souffre autour de nous, sans toujours que nous le sachions.
- Pas uniquement le papillon ?
- Non. Toi. Moi. Ou encore des choses qu'on a aimées et qui ne sont plus, quoi qu'on puisse imaginer pour les faire revivre.
- Si je comprends bien, la question revient pour toi à savoir si je t'aime ?
- Tu as bien compris, même si je n'ai jamais su exprimer ce que je ressens.
- Tu t'es bien exprimée, au contraire.
- Est-ce que nous sommes en train de mourir ?
- Nous sommes en train de mourir.
- Je voudrais que tu saches une chose.
- Quoi encore ?
- C'est que je n'ai jamais vu de papillon jaune et vert.
- Je le savais.
Louis Calaferte.
"Memento Mori"
22:00 Publié dans Coups de coeur | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, lyon | Facebook |
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vendredi, 06 février 2009
Pause enneigée
Demain je pars pour une semaine en Haute-Savoie. Pas de ski, juste un changement d'air. Et cultiver l'art d'être grand-mère, tante...bref, aux fourneaux.
Juste quelques livres. Des romans asiatiques car j'ai besoin de lecture apaisante. "De soie et de sang" du Chinois Xiaolong et "Itinéraire d'enfance" de la vietnamienne Duong Thu Huong.
Et une ritournelle pour oublier la sinistrose, même si je sais qu'il en faut plus que ça.
Grâce à Dominique, j'ai découvert sur le blogue de Patrick Mottard, cette ritournelle populaire et sans prétention dont le Faucon a fait connaître une parodie. Bel exemple d'oecuménisme politique puisque Patrick Mottard est de gauche et le Faucon de droite !
Retrouver l'art de la ritournelle qui vous vide l'esprit avec quelques notes de musique.
08:09 Publié dans Au jour le jour | Lien permanent | Commentaires (37) | Facebook |
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mardi, 03 février 2009
Aux Xanthines
Brigitte Armet
Exposition aux Xanthines
33 rue de Condé à Lyon
jusqu'au 22 février 2009.
Vernissage le 7 février à 15 heures.

15:31 Publié dans Xanthines | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : lyon, expositions | Facebook |
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lundi, 02 février 2009
Février, c'est pas mieux
N'en déplaise à Solko moi je trouve au mois de février un immense intérêt : celui de mettre fin à janvier. Je déteste janvier qui commence dans l'euphorie des bises conventionelles et nous inflige ses 31 jours interminables après les 31 de décembre. Bon pour les patrons moins pour nos porte-monnaie. Le mois le plus froid, le plus gris de l'année où les jours ne se sont pas encore donné la peine de rallonger. Le mois des soldes, dont on ne peut même pas profiter parce qu'on est fauché après Noël et qu'on a pris des kilos. Le mois qui commence l'année et en annonce une de plus au compteur. Le mois où il faut se gratter les neurones pour remplir un chèque sans se tromper. Donc en temps normal j'aime février et son doux chuintement de syllabes labiales qui appellent le baiser. Mais cette année, la barbe. Janvier joue les prolongations. Même si j'ai vu dans mon jardin pointer des feuilles de jonquilles, c'est janvier qui ne veut pas laisser sa place. Le sale traître.
Alors je vous propose un bon petit passage vers un fantasme ancien. Car vous, vous en aviez marre de ma littérature scolaire. Avouez...à part Dominique et Choubine...
Donc j'annonce monsieur...de battre mon coeur s'est arrëté...

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dimanche, 01 février 2009
Et l'assassin est...
L'assassinat du professeur de mécanique, publié hier, était le second du roman "Saint-Eloi priez pour eux". Pour le premier meurtre, on avait retrouvé un professeur de chaudronnerie, chez lui, mort avec une pointe à tracer à côté de son cadavre. D'emblée mes auteurs avaient choisi un tueur en séries accomplissant des meurtres rituels. La pointe à tracer devait toujours accompagner le crime.
La victime du troisième assassinat sera un professeur de l'atelier de menuiserie.
"Il était 19 heures. Antoine Comble, chef d'atelier d'agencement, entra dans son bureau complètement frigorifié par le froid de janvier. L'atelier était noir et vide, aucune classe n'y avait travaillé cet après-midi -là. (...)
Il alluma et c'est alors qu'il la vit...
Antoine Comble découvrit, posée sur son bureau, la tête de son collègue, François Jeunedin, une pointe à tracer plantée dans l'oeil.
C'était le professeur de bois de 1ère année. La tête, dégoulinante de sang avait taché tous les papiers. Les moustaches raides se dressaient à la perpendiculaire.
(...)
Dans l'atelier il découvrit une traînée rouge qui allait du sac de sciure à la scie à ruban. Au pied de la table de travail, une flaque de sang. La table et le ruban de la scie en était complètement couverts.
(...)
Une demi-heure plus tard, le commissaire Jwedski était à l'atelier. La trace de sang le conduisit à des sacs poubelles : en ouvrant un, il découvrit le corps du professeur de bois coupé en morceaux."
Pour le quatrième et dernier meurtre, dans l'atelier d'électricité, l'enseignant et future victime introduit lui-même son meurtrier. C'est un familier de l'école qui demande à voir une démonstration d' arc électrique.
" L'homme attrapa Tiral à bout de force, l'empoigna et appuya sa figure contre l'arc électrique.
Benoît Tiral mourut en une demi-seconde.
Son coeur cessa de battre, il s'écroula au sol.
L'homme se baissa, le retourna pour le voir mort une dernière fois. Le visage était carbonisé, méconnaissable. (...)
Il avait accompli l'acte qui le faisait jubiler, cette fois sa mission était accomplie."
Qui était donc l'assassin ?
Un surveillant de l'établissement. Evidemment le plus strict et le plus sévère.
Mobile ?
Après le collège, il n' avait pas été admis dans cette école qui pratiquait une sélection relativement exigeante. À la fin de ses études, il s'était fait embaucher comme surveillant pour se venger.
Dès la première séance de travail, mes auteurs avaient conçu tout le déroulement de l'intrigue et m'avaient beaucoup impressionnée par leur imagination. L'écriture a pris toute l'année scolaire, à raison d'une heure par semaine. Je ne sais ce qu'ils sont devenus...mais j'espère qu'ils n'ont pas oublié.
19:39 Publié dans Souvenirs de prof | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook |
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samedi, 31 janvier 2009
Assassinat du professeur
Suite de la description de l'atelier de mécanique.
Notre professeur qui a longuement contemplé son atelier, se retrouve devant ses élèves.
" Pascal Virodet rejoignit à regret ses élèves de première année qui l'attendaient en salle de technologie. Certes, il aimait enseigner, mais c'était auprès des machines de l'atelier qu'il était pleinement heureux. Il avait pour elles des gestes soigneux et précis et leur consacrait une attention qu'il souhaitait transmettre à ses élèves. Il commença son cours sur les procédés de refroidissement du métal mais l'écourta tant il mourrait d'envie d'essayer la nouvelle meuleuse. Il proposa aux élèves, ravis d'échapper à un cours rasoir, de leur montrer comment raffûter une pointe à tracer.
(...) Il prit la pointe à tracer d'un de ses élèves et la plaça contre la meule arrêtée. Il expliqua longuement le mouvement de la pointe qui doit rouler sous les doigts et la position exacte pour limiter l'usure de la meule. Tous étaient très attentifs, pressés de voir fonctionner cette nouvelle machine.
Virodet enclencha la rotation de la meule.
Brusquement celle-ci se fendit puis explosa en plusieurs blocs dont l'un vint frapper le professeur au front. Le bruit assourdissant domina la symphonie des machines. Il fut projeté au sol, l'oreille déchiquetée, en sang.
Les élèves les plus proches se retrouvèrent également à terre, tout ensanglantés. Les autres hurlaient de terreur. Affolés ils se précipitèrent vers la sortie, se bousculant et se heurtant aux machines de l'atelier."
extrait de "Saint-Éloi priez pour eux", roman policier écrit par les élèves du lycée La Mache en 1998.
08:51 Publié dans Souvenirs de prof | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : lyon, vive la vie | Facebook |
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vendredi, 30 janvier 2009
Élèves de mécanique
La découverte récente de Georges Navel, écrivain autodidacte, ouvrier d'origine, m'a donné le regret de ne pas l'avoir connu au temps où j'enseignais dans un lycée industriel de Lyon. Le regard de l'ouvrier devenu écrivain aurait peut-être aidé certains de mes élèves paralysés devant la feuille blanche par le complexe,
absurde et innoculé par la société
d'être un manuel.
Et pourtant,
à l'époque glorieuse où l'Éducation nationale nous laissait le temps de le faire,
nous avons en classe, écritensemble un roman, paru chez un vrai éditeur, publié aux Éditions du Rhône, autofinancé par une souscription à laquelle avaient répondu les parents et les collègues.
Roman policier, "Saint-Éloi priez pour eux", dans lequel les adolescents avaient éprouvé la satisfaction d'exécuter un certain nombre de leurs professeurs. Curieusement d'ailleurs, leurs enseignants préférés. Parmi mes auteurs, des élèves en mécanique, les plus allergiques aux cours de français. Pourtant la description qu'ils font de leur atelier vaut bien du Navel.
Il s'agit d'un texte patchwork, constitué par le travail de plusieurs rédacteurs que j'avais dû minutieusement reconstituer pour arriver à un ensemble cohérent. Mais tous les mots sont ceux des élèves.
"Il se mit à contempler longuement devant lui l'atelier qu'il dominait. Le vieil atelier était immense, éclairé par de larges verrières enserrées dans uns charpente métallique. À gauche, sur un mur d'un jaune passé, des dessins naîfs illustraient le noble métier de mécanicien.Devant lui des machines sagement alignées comme de braves soldats avant la bataille, attendaient les élèves. On voyait les gros tours devant : c'était les machines réservées aux élèves de terminale. La plupart étaient âgées, elles avaient formé des générations de mécaniciens.(...)
Il apprécia le sol impeccable, sans la moindre trace de limaille ni de copeaux grâce à l'application des élèves qui avaient balayé hier soir, comme tous les soirs.(...)
Les élèves étaient maintenant tous au travail et le bleu de leurs combinaisons se mêlait au vert froid des machines. Il entendit alors le bruit de l'atelier. Le bruit séleva, des sons nouveaux se relayant par intermittence. Oo aurait dit un orchestre symphonique où les soufflettes jouaient les aigus, les vérins pneumatiques donnaient les notes médium et les basses étaient assurées par les grosses fraiseuses qui faisaient trembler le sol."
Ce travail au cours duquel je m'étais beaucoup amusée, ne serait-ce que pour les intrigues que mes élèves avaient imaginées entre les gens du lycée, est un des meilleurs souvenirs de ma carrière. Il avait réconcilié ces adolescents réfractaires à la lecture avec l'objet livre. Quand je relis la dernière phrase de ce passage, je revois son auteur. Un garçon passionné par la mécanique et détestant le français : c'est peut-être la seule phrase de sa vie qu'il aura écrite avec bonheur.
Quant à moi, je ne connais toujours pas les machines dont il parle !
11:12 Publié dans Souvenirs de prof | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : lyon | Facebook |
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