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lundi, 02 février 2009

Février, c'est pas mieux

N'en déplaise à Solko moi je trouve au mois de février un immense intérêt : celui de mettre fin à janvier. Je déteste janvier qui commence dans l'euphorie des bises conventionelles et nous inflige ses 31 jours interminables après les 31 de décembre. Bon pour les patrons moins pour nos porte-monnaie. Le mois le plus froid, le plus gris de l'année où les jours ne se sont pas encore donné la peine de rallonger. Le mois des soldes, dont on ne peut même pas profiter parce qu'on est fauché après Noël et qu'on a pris des kilos. Le mois qui commence l'année et en annonce une de plus au compteur. Le mois où il faut se gratter les neurones pour remplir un chèque sans se tromper. Donc en temps normal j'aime février et son doux chuintement de syllabes labiales qui appellent le baiser. Mais cette année, la barbe. Janvier joue les prolongations. Même si j'ai vu dans mon jardin pointer des feuilles de jonquilles, c'est janvier qui ne veut pas laisser sa place. Le sale traître.

Alors je vous propose un bon petit passage vers un fantasme ancien. Car vous, vous en aviez marre de ma littérature scolaire. Avouez...à part Dominique et Choubine...

Donc j'annonce monsieur...de battre mon coeur s'est arrëté...

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samedi, 31 janvier 2009

Assassinat du professeur

Suite de la description de l'atelier de mécanique.

Notre professeur qui a longuement contemplé son atelier, se retrouve devant ses élèves.

" Pascal Virodet rejoignit à regret ses élèves de première année qui l'attendaient en salle de technologie. Certes, il aimait enseigner, mais c'était auprès des machines de l'atelier qu'il était pleinement heureux. Il avait pour elles des gestes soigneux et précis et leur consacrait une attention qu'il souhaitait transmettre à ses élèves. Il commença son cours sur les procédés de refroidissement du métal mais l'écourta tant il mourrait d'envie d'essayer la nouvelle meuleuse. Il proposa aux élèves, ravis d'échapper à un cours rasoir, de leur montrer comment raffûter une pointe à tracer.

(...) Il prit la pointe à tracer d'un de ses élèves et la plaça contre la meule arrêtée. Il expliqua longuement le mouvement de la pointe qui doit rouler sous les doigts et la position exacte pour limiter l'usure de la meule. Tous étaient très attentifs, pressés de voir fonctionner cette nouvelle machine.

Virodet enclencha la rotation de la meule.

Brusquement celle-ci se fendit puis explosa en plusieurs blocs dont l'un vint frapper le professeur au front. Le bruit assourdissant domina la symphonie des machines. Il fut projeté au sol, l'oreille déchiquetée, en sang.

Les élèves les plus proches se retrouvèrent également à terre, tout ensanglantés. Les autres hurlaient de terreur. Affolés ils se précipitèrent vers la sortie, se bousculant et se heurtant aux machines de l'atelier."

extrait de "Saint-Éloi priez pour eux", roman policier écrit par les élèves du lycée La Mache en 1998.

 

vendredi, 30 janvier 2009

Élèves de mécanique

La découverte récente de Georges Navel, écrivain autodidacte, ouvrier d'origine, m'a donné le regret de ne pas l'avoir connu au temps où j'enseignais dans un lycée industriel de Lyon. Le regard de l'ouvrier devenu écrivain aurait peut-être aidé certains de mes élèves paralysés devant la feuille blanche par le complexe,

absurde et innoculé par la société

d'être un manuel.

Et pourtant,

à l'époque glorieuse où l'Éducation nationale nous laissait  le temps de le faire,

nous avons en classe,  écritensemble  un roman, paru chez un vrai éditeur, publié aux Éditions du Rhône, autofinancé par une souscription à laquelle avaient répondu les parents et les collègues.

Roman policier, "Saint-Éloi priez pour eux", dans lequel les adolescents avaient  éprouvé la satisfaction  d'exécuter un certain nombre de leurs professeurs. Curieusement d'ailleurs, leurs enseignants préférés. Parmi mes auteurs, des élèves en mécanique, les plus allergiques aux cours de français. Pourtant la description qu'ils font de leur atelier vaut bien du Navel.

Il s'agit d'un texte patchwork, constitué par le travail de plusieurs rédacteurs que j'avais dû minutieusement reconstituer pour arriver à un ensemble cohérent. Mais tous les mots sont ceux des élèves.

"Il se mit à contempler longuement devant lui l'atelier qu'il dominait. Le vieil atelier était immense, éclairé par de larges verrières enserrées dans uns charpente métallique. À gauche, sur un mur d'un jaune passé, des dessins naîfs illustraient le noble métier de mécanicien.Devant lui des machines sagement alignées comme de braves soldats avant la bataille, attendaient les élèves. On voyait les gros tours devant : c'était les machines réservées aux élèves de terminale. La plupart étaient âgées, elles avaient formé des générations de mécaniciens.(...)

Il apprécia le sol impeccable, sans la moindre trace de limaille ni de copeaux grâce à l'application des élèves qui avaient balayé hier soir, comme tous les soirs.(...)

Les élèves étaient maintenant tous au travail et le bleu de leurs combinaisons se mêlait au vert froid des machines. Il entendit alors le bruit de l'atelier. Le bruit séleva, des sons nouveaux se relayant par intermittence. Oo aurait dit un orchestre symphonique où les soufflettes jouaient les aigus, les vérins pneumatiques donnaient les notes médium et les basses étaient assurées par les grosses fraiseuses qui faisaient trembler le sol."

Ce travail au cours duquel je m'étais beaucoup amusée, ne serait-ce que pour les intrigues que mes élèves  avaient imaginées entre les gens du lycée, est un des meilleurs souvenirs de ma carrière. Il avait réconcilié ces adolescents réfractaires à la lecture avec l'objet livre. Quand je relis la dernière phrase de ce passage, je revois son auteur. Un garçon passionné par la mécanique et détestant le français : c'est peut-être la seule phrase de sa vie qu'il aura écrite avec bonheur.

Quant à moi, je ne connais toujours pas les machines dont il parle !

mercredi, 28 janvier 2009

Les cailloux et l'essentiel

Récemment j'ai eu l'occasion d'entendre une sorte de parabole qui m'a beaucoup éclairée. Je vous la résume, mais vous pouvez la lire intégralement avec le lien.

Il s'agit d'un vieux professeur qui tente d'enseigner à ses élèves comment utiliser le mieux possible son temps.

Il prend un pot et le remplit de gros cailloux. Le pot paraît plein, pourtant il ajoute des graviers et peut encore le compléter avec du sable.

Il fait alors constater à ses élèves : si vous aviez commencé par le sable, vous auriez rempli votre pot sans pouvoir ajouter rien d'autre. Les gros cailloux représentent ce qui est essentiel dans une vie. Si on introduit d'abord les broutilles sans intérêt (graviers et sable) on ne laisse pas de place à l'essentiel.

Je suis arrivée à ce qu'il faut bien appeler la dernière étape de la vie, je parle bien sûr de la vie consciente, lucide, parfaitement assumée. Donc cette question du choix de l'essentiel est fondamentale. Quand on a une activité professionnelle, on a moins cette nécessité de choix : l'essentiel s'impose par lui-même. Quand le pot de la vie est vide, qu'on peut le remplir à sa guise, ce que beaucoup nous envient, on est obligé de s'interroger sur les choix qu'on fait pour occuper  son temps.

Il me semble que j'ai du ménage à faire dans la mienne.

lundi, 26 janvier 2009

Bonne année du buffle

à ma jeune amie chinoise; Zhang Lei

Nouvel an chinois...Les maisons vont être décorées de sentences parallèles. Des textes poétiques qui encadrent les entrées et portent bonheur.

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Cette année sera l'année du buffle. J'ai cotoyé ce sympathique animal, très aimé des Chinois, à l'occasion de mon dernier voyage.
Le buffle est indissociable du paysage des rizières. Et pourtant cet heureux animal ne travaille guère. En tout et pour tout deux semaines par an. Il n’est jamais utilisé comme animal de trait. On ne le mange pas. C’est en quelque sorte un animal de compagnie que les paysans sortent le matin pour aller paître. On le voit également se prélasser dans l’eau des rivières, sous les ponts.
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Mais il nous a offert un spectacle sympathique qui nous a fort réjouis. À l’occasion de la fête de la lune, nous avons pu assister à un combat de buffles. Aucune violence : les deux animaux se poussent tête contre-tête et le premier qui cède a perdu.
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Rien à voir avec les coqs de combat que nous avons pu rencontrer presque tout déplumés dans certains villages. Spectacle dans le spectacle : les paysans attentifs, leur pipe à eau à la bouche.
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Toutefois il y a un prix à payer pour nos buffles. On ne les tue pas …sauf tous les 13 ans au cours d’une fête rituelle à la mémoire des Ancêtres. De nombreux buffles sont sacrifiés. À cette occasion,on mange du buffle, à l’exclusion de toute autre nourriture pendant huit jours.

Extrait d'un passage de Pearl Buck dans "Terre chinoise".
Une famille est dans la plus grande misère suite à une série de mauvaises récoltes.Le grand-père  suggère de manger le buffle.
« Le vieillard dit :
« Bientôt nous allons manger le buffle. »
Alors Wang Lung se récria, car c’était pour lui comme si on eüt dit : « Bientôt nous allons manger un homme. »
Le buffle était aux champs son compagnon et il avait marché derrière lui en le félicitant ou en l’injuriant suivant son humeur et depuis sa jeunesse qu’il connaissait la bête, qu’on avait achetée petit veau. »

Pearl Buck

jeudi, 22 janvier 2009

Victor et François

C'est l'histoire d'un compagnonnage au-delà de la mort : celui de Victor Segalen et de François Cheng. Deux passeurs marchant en sens inverse.

segalen-1.gifVictor Segalen breton, médecin, poète et voyageur. Il va parcourir la Chine de 1908 à 1918 avant de décéder en 1919.

Par amour pour cette nation et cette civilisation il deviendra archéologue et conduira des recherches et des fouilles sur la dynastie Han. Son recueil de poèmes "Stèles" est un hymne à la Chine.

Cité violette interdite

"Elle est bâtie à l'image de Pei-king, capitale du Nord, sous un climat chaud à l'extrême ou plus froid que l'extrême froid.

À l'entour, les maisons des marchands, l'hôtellerie ouverte à tout le monde avec ses lits de passage ses mangeoires et ses fumiers.

En retrait, l'enceinte hautaine, la Conquérante aux âpres remparts, aux redans, aux châteaux d'angles pour mes bons défenseurs.

Au milieu, cette muraille rouge, réservant au petit nombre son carré d'amitié parfaite.

Mais, centrale, souterraine et supérieure, pleine de palais, de lotus, mes eaux mortes, d'eunuques et de porcelaines, -- est ma Cité Violette interdite."

 

François Cheng est né chinois et est  devenu français par amour de la culture française. Il a été admis à l'Académie française.

Poète, auteur de très beaux romans comme "Le dit de Tyany", traducteur, essayiste.

Ils ne pouvaient que se rencontrer même si François Cheng est né en Chine dix ans après la mort de Segalen. C'est dans un livre de François Cheng que la rencontre avec Victor Segalen s'est produite.

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"L'un vers l'autre" est le tite de cet ouvrage. François découvre sa Chine à travers les mots de Victor. Voyage commun, main l'un vers l'autre, le breton et le chinois.

François comprend la poésie de Victor.

"Avant que ne s'achève le XXè siècle, il serait bon, n'est-ce pas, qu'ayant fait le parcours inverse, quelqu'un venu de l'Orient extrême vienne saluer le poète en sa terre natale, en ce "finistère" de l'Occident extrême."

Ce que François admire chez Victor c'est sa confrontation avec le réel, la géographie chinoise si dure au voyageur que Victor a affronté parfois au péril de sa vie. Comme cette descente en sempan, bateau fragile,  dans les gorges du Yang-Tse dont les remous sont mortels. (à ce jour ils ne le sont plus depuis le barrage des Trois-Gorges)

"Cette espèce de mythologie géographique (ou dynamisme universel), Segalen l'a sentie très fort et fait entrer dans sa propre vision."

Le poète se laisse transformer par la terre chinoise. L'homme des bords de mer  découvre la puissance de la terre, les montagnes, lieux sacrés dans l'imaginaire chinois. Et surtout "Le fleuve". (Le Yang-Tse)

"Mais le Fleuve, par son existence fluidique, ordonnée, contenue, donnant l'impression de la Cause, du Désir, est accessible à tous les amants de la vie." écrit Victor et François lit : "À l'image du Fleuve, de nature à la fois Yin (douceur porteuse) et yang (écoulement puissant), il a vu au travers d'un combat proprement sexuel, sa propre double nature, mausculine et féminine, pleinement révélée".

François a été bouleversé par les écrits de Victor sur ses voyages en Chine. Lui-même s'est senti, dans les années soixante,  quand la Chine était fermée au monde, en exil en France ayant perdu l'espoir d'y retourner un jour. Les livres de Victor lui ont évité de sombrer dans la dépression. Grâce à lui il retrouvait son pays et découvrait des régions qu'il n'avait jamais visitées. Et il conclut.

"Je venais de faire le même voyage que Segalen, sous une forme autre, et que ce qui me semblait à jamais hors d'atteinte m'était offert sans réserve.Toute nostalgie évanouie, je me suis senti réconcilié avec la terre de France qui m'avait accueilli."

mardi, 20 janvier 2009

Tourner une page

Sur le blogue de Louis-Paul j'ai lu un conseil salutaire : savoir tourner une page. Aucun problème pour moi, j'ai toujours pu, il me semble, tourner la page quand c'était nécessaire.

Aujourd'hui c'est ma page chinoise que je vais tourner. Non pas mon intérêt pour la Chine mais mon investissement par rapport à cette nation.

À midi, j'ai déjeuné avec le bureau de mon association, Chine-Service, pour préparer l'Assemblée générale extraordinaire de dissolution de l'association.

Raisons multiples... Le président et fondateur qui a un gendre chinois se fait âgé. Bien que très en forme il  souhaite s'arrêter et personne pour prendre sa relève.

Mais aussi on parle tellement de la Chine aujourd'hui que notre petite voix est devenue inaudible.

Triste nouvelle apprise aujourd'hui,  la fondatrice de Couleurs de Chine qui parraine la scolarité des fillettes chinoises dans les campagnes, celles qu'on appelle les "baguettes", est décédée dans l'incendie de sa maison de bois, à Danian en Chine, au mois de décembre.

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Dans les minorités, la scolarisation des enfants n'est pas obligatoire sauf ...au Tibet. On n'envoie donc à l'école que les garçons.
Couleurs de Chine permet aux filles de bénéficier d'un enseignement.